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SOUVENIRS AUTOBIOGRAPHIQUES

et d’hommage, — la religion de la peur — envers le redoutable Moloch de cette scène. De là, connue par des conducteurs électriques circulait dans toutes les régions de l’établissement une sensibilité frissonnante dont les vibrations rayonnaient vers le centre.

O Rowland-Hill, combien différente est la discipline de ton établissement, et quels autres échos rendent les voûtes antiques des Bruces. Là l’enfant craintif peut être heureux, là il est possible à l’enfant destiné à une mort prématurée de moissonner en paix son court automne. Pourquoi n’existait-il pas en ces temps-là de semblables asiles ? L’homme se développait pourtant alors comme aujourd’hui en beauté et en force. Pourquoi donc n’employait-il pas son pouvoir à créer des établissements où l’on cultivât le bonheur aussi bien que les connaissances ? Pourquoi ne criait-on pas bien haut :


« Donnez au matin de l’adolescence sa part naturelle de bénédiction. »


Soit : le pourquoi, le comment, ne seront jamais bien éclaircis, mais c’était comme cela, ces choses n’existaient point, ou si elles existaient quelque part, dans de petits établissements locaux, à peine connus en dehors d’un petit cercle de gens et dans lesquels il ne se trouvait peut-être d’autres personnes étrangères que celles de la tranquille famille où vivaient mes deux frères, famille qui se réduisait à eux deux. Cependant, le plus âgé des deux, en une heure fatale, avait quitté ce sanctuaire si tranquille, avait renoncé à cette paix que peut-être il ne devait jamais plus retrouver, car, comme je l’ai dît, il tomba au pouvoir de ce Mo-