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SOUVENIRS AUTOBIOGRAPHIQUES

pour vivre dans un milieu de luxe. La tempérance générale, la modération sobre dans la conduite est néanmoins bien loin de coïncider avec cette absence d’étalage somptueux, et cette absence même nous devons l’attribuer à leur pauvreté plutôt qu’à leur volonté. C’est, à mon avis, un très grand honneur pour notre pays, que de voir les sources de la science fréquentées par ceux qui n’ont d’autres mobiles que leur désir désintéressé de s’instruire, par des gens qui, à la connaissance de tous, ne demandent à l’université ni de leur partager ses ressources pécuniaires, ni de leur donner son enseignement comme un moyen de gagner de l’argent. Sans doute il n’est point dégradant, et de plus il est inévitable qu’une grande proportion des étudiants suivent la carrière académique avec l’intention principale d’en faire l’instrument auquel ils devront plus tard leur gagne-pain. Mais je le répète encore, je crois qu’il est de l’intérêt essentiel de la science et des belles-lettres, qu’un corps nombreux de volontaires se réunisse autour de leurs drapeaux sans demander ni solde ni avancement. Cela se voit sur une plus vaste échelle que partout ailleurs à Oxford et à Cambridge, et c’est demander, en retour, bien peu de chose à l’Université que d’en exiger qu’elle accorde ce que peut-être elle n’a pas le droit de refuser, le droit pour ceux qui s’enferment dans son enceinte, de vivre comme ils vivraient dans la maison paternelle, en interdisant uniquement tous les genres de dépenses qui sont en elles-mêmes des excès immoraux, ou des occasions de scandale, ou de nature à diminuer le nombre d’heures que l’on doit naturellement à l’étude, ou enfin qui auraient pour résultat de porter à une émulation ruineuse