Page:Rabelais - Pantagruel, ca 1530.djvu/119

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cedé es humains de garder et defendre soy, leurs femmes, enfans, pays, et famille en cas que ne seroit ton negoce propre, qui est la foy : car en tel affaire tu ne veulx nul coadiuteur : sinon de confession catholicque, et ministere de ta parolle : et nous as defenduz toutes armes et defenses : car tu es le tout puissant, qui en ton affaire propre, et où ta cause propre est tirée en action, te peulx defendre trop plus qu’on ne sçauroit estimer : toy qui as milliers de centaines de millions de legions d’anges, duquel le moindre peut occire tous les humains, et tourner le ciel et la terre à son plaisir, comme bien appareut en l’armée de Sennacherib. Doncques s’il te plaist à ceste heure me estre en ayde comme en toy seul est ma totalle confiance et espoir, Ie te fays veu que par toutes contrées tant de ce pays de Utopie que d’ailleurs où ie auray puissance et auctorité, Ie feray prescher ton sainct Evangile, purement, simplement, et entierement, si que les abuz d’ung tas de papelars et faulx prophetes, qui ont par constitutions humaines et inventions depravées envenimé tout le monde, seront d’entour moy exterminées. Et alors fut ouye une voix du ciel, disant. Hoc fac, et vinces : c’est à dire. Fays ainsi, et tu auras victoire. Ce faict voyant Pantagruel que Loupgarou approchoit la gueulle ouverte, vint contre luy hardiment et s’escrya tant qu’il peut. À mort ribault à mort, pour luy faire peur, selon la discipline des Lacedemoniens, par son horrible cry. Puis luy getta la barque, qu’il portoit à sa ceincture, plus de dix et huit cacques de sel, dont il luy emplit et gorge et gouzier, et le nez et les yeulx. Dont irrité Loupgarou luy lancea ung coup de sa masse, luy voulant rompre la cervelle. Mais Pantagruel fut abille et eut tous-