Page:Rabelais - Pantagruel, ca 1530.djvu/29

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publicquement, ung escholier se voulut mettre en danse, ce que ne permirent pas lesdictz marroufles. Quoy voyant Pantagruel leur bailla a tous la chasse iusques au bort du Rosne, et les vouloit faire tous noyer : mais ils se musserent contre terre comme taulpes bien demie lieue soubs le Rosne : Et le pertuys encores y apparoist. Et apres il sen partit, et vint a Angiers, ou il se trouvoit fort bien : et y eust demeure quelque espace, neust este que la peste les en chassa. Ainsi sen vint a Bourges ou estudia bien long temps et proffita beaucoup en la faculte des loix. Et disoit aulcunesfois que les livres des loix luy sembloient une belle robbe dor triumphante et precieuse a merveilles, qui feust brodee de merde : car disoit il, au monde ny a livres tant beaulx, tant aornez, tant elegans, comme sont les textes des Pandectes : mais la brodure diceulx, cest assavoir la glose de Accursius, est tant salle, tant infame et punaise, que ce nest quordure et villenie. Partant de Bourges vinct a Orleans, et la trouva force rustres descholliers, qui luy firent grand chere a sa venue : et en peu de temps aprint avecques eulx a iouer a la paulme si bien quil estoit maistre. Car les estudians dudict lieu en font bel exercice : et le menoient aulcunesfois es isles pour sesbatre au ieu du Poussavant. Et au regard de se rompre fort la teste a estudier, il ne le faisoit point, de peur que la veue ne luy diminuast. Mesmement que ung quidam des regens disoit souvent en ses lectures, quil ny a chose si contraire a la veue, comme est la maladie des yeulx. Et quelque iour que l’on passa Licentie en loix quelquung des escholliers de sa congnoissance, qui se science nen avoit gueres plus que sa portee : mais en recompense scavoit fort