Page:Rabelais - Pantagruel, ca 1530.djvu/98

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miliaires, ny parasanges, iusques à ce que le roy Pharamond les distingue, ce que fut faict en la maniere que s’ensuyt. Car il print dedans Paris cent beaux ieunes et gallans compaignons bien deliberez, et cent belles garses picardes : et les feit bien traicter et bien penser par huict iours puis les appella et à ung chascun sa garse avecques force argent pour les despens, leur faisant commandement qu’ilz s’en allassent en divers lieux par cy et par là. Et à tous les passaiges qu’ilz chevaucheroient leurs garses qu’ilz missent une pierre, et ce feroit une lieue. Par ainsi les compaignons ioyeusement partirent, et pour ce qu’ilz estoient frays et de seiour ilz chevauchoient à chasque bout de champ et voylà pourquoi les lieues de France sont tant petites. Mais quand ilz eurent long chemin parfaict et estoient ilz las comme pouvres diables et qu’il n’y avoit plus d’olif en ly caleil, ilz ne chevauchoient pas si souvent et se contentoient bien (ientends quant aux hommes) de quelque meschante paillarde foys le iour. Et voylà qui faict les lieues de Bretaigne, d’Elanes, d’Allemaignes, et aultres pays plus esloignez, si grandes. Les aultres mettent d’aultres raisons mais celle là me semble la meilleure. A quoy consentit voulentiers Pantagruel. Partans de Rouen arriverent à Hommefleur où se mirent sur mer Pantagruel, Panurge, Epistemon, Eusthenes, et Carpalim. Auquel lieu attendant le vent propice et calfretant leur nef receut d’une dame de Paris (laquelle il avoit entretenu bonne espace de temps) unes lettres inscrites au dessus. Au plus aymé des belles, et moins loyal des preux, P N T G R L. Laquelle inscription leue il fut bien esbahy, et demandant au messagier le nom de celle qui l’avoit