Page:René Crevel La Mort Difficile 1926 Simon Kra Editeur.djvu/138

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avec la furtive prudence des voleuses vous effleurent mais, les cils rencontrés, soudain s’enfuient car elles ont peur de ces herses qui défendent les secrets des hommes et leurs résumés aux belles couleurs, les yeux. Ce front définitif dans l’incertitude aigre du petit jour, ce front définitif parmi le désordre du lit, son bonheur lisse, de quel bois a-t-il été sculpté ? De quel bois ou de quel marbre ? Le crâne de Pierre est une triste maison d’os et son toit de cheveux le plus misérable des chaumes. La tête de Bruggle, au contraire, laquée d’une cruelle innocence, est le temple où la jeunesse embellit tout. La jeunesse. Avec elle se confond celui qui dort, ignorant des cauchemars. Bruggle n’est pas de ceux qui attendent ou même laissent venir leur soir. Il ne mourra point, mais s’évaporera dans la plus insolente des lumières, semblable aux nuages nés à midi qui, après s’être amusés à jeter d’un ciel trop chaud, trop cru les promesses de terre mouillée, au crépuscule n’adoucissent plus le couvercle de plomb d’où nul ne continue à oser espérer des colliers de pluie.

Mais parce que cette fraîcheur n’est pas encore près de se ternir, et comme si elle ne devait durer que pour son bonheur, Pierre se persuade que Bruggle, petit sauvage, lui est trop secourable pour qu’il permette ce soir aucune tristesse au premier plan. Le dîner avec Diane (son silence n’est pas l’ennui) sert