Page:René Crevel La Mort Difficile 1926 Simon Kra Editeur.djvu/197

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sible. Par sa faute. Il sacrifiait Diane. À qui ? À un petit Américain venu en France comme laveur de vaisselle et pour qui le bonheur, la liberté sont de danser le torse nu, avec un chiffonnier inverti. Vraiment, il n’y a pas de quoi être fier. Aujourd’hui il est puni, comme il le mérite. Il a accroché un sourire entre ses deux joues, mais le masque est trop transparent. Le couple des danseurs qui à nouveau le frôle semble le narguer. Pour se forcer à demeurer indifférent, Pierre enfonce ses ongles dans ses paumes. Piètre remède. Le couple des danseurs a tort de venir à lui pour la troisième fois, car des ongles qui renoncent à torturer leurs propres mains entrent dans un cou, le cou d’Arthur, des pieds commencent leur besogne de rage et de vengeance en dépit des murmures surpris de douleur. Totor, Arthur, enfin séparés, secouent Pierre qui hurle des injures et ne veut lâcher prise. Les invités de Bruggle s’interposent. Les doigts de Pierre doivent abandonner une nuque où ils se sont imprimés en rose. Lui, il est tout blanc ; ses lèvres tremblent. La Roumano-Scandinave, heureuse au fond de cette scène, mais ne tenant point à ce qu’elle se prolonge, essaie de le calmer :

— Allons, mon cher, pas de folies.

— Pas de folies, taisez-vous, grosse momie.

— S’il vous plaît soyez poli. Vous oubliez à qui vous parlez.