Page:René Crevel La Mort Difficile 1926 Simon Kra Editeur.djvu/70

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qu’elle s’efforce à confondre, pour la bonne humeur et la santé, avec la courageuse banlieue sa voisine. Alors, qu’importe si pour la millième fois Mme  Blok décrit son salon, ses invités, sa robe, ses bas, ses souliers, récite le menu et la carte des vins du dîner qu’elle offrait le soir même où ce pauvre Dimitri, en pantalons à grands carreaux et bras de chemise, tandis que, depuis une heure — et que Dieu daigne dans sa miséricorde voir la folie d’une telle conduite et ne refuse point à ce maître de maison qui perdit la tête un paradis fermé à qui se donne volontairement la mort — il eût dû être en smoking… et tralalalalalalalalala, se chantonne Diane, sans volonté d’insolence, mais seulement parce qu’elle est jeune, aime les fruits, la danse, préfère la citronnade à la vodka, au champagne même et rêve volontiers des chemins de montagne à la nuit tombante ou d’une eau de mer qui parfume ses bras de nageuse au soleil. Et elle embrasse la peau, qui recouvre un biceps dont elle est assez fière. Cette peau qui ne sent plus le sel est une peau de Paris. Paris. Elle doit aller maintenant à son atelier, ce soir dans tel café de Montparnasse, demain à un bal au profit d’elle ne sait quels Russes, après-demain… elle se dit que tout cela l’ennuierait fort si Pierre… Elle s’arrête. Pas un travail, pas une fête ne lui plaisent sans Pierre. D’autres pourtant sont plus sûrs, plus charmeurs même que ce grand enfant capricieux et grognon. Qu’importe. Et déjà elle songe à la conso-