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LE BROUILLARD DU 26 OCTOBRE

raient à mesure qu’ils se rapprochaient du continent, si bien que le fond du petit golfe était déjà fourré de cette verdoyance qui virait jusqu’à nous et allait ensuite se clairsemant vers la pointe de notre cap. Au milieu du fer à cheval, l’arête du coteau se laissait voir par-dessus les bois, nue, chauve et rougeaude contre l’azur violacé du temps…

Et c’est là que débouchèrent pesamment, un à un, quatre éléphants si monumentaux que, pour évaluer la distance qui nous séparait d’eux — plus de 800 mètres à vol d’oiseau — je dus me rappeler les véritables proportions du terroir. Quoi qu’il en fût, nous nous trouvâmes d’un commun accord à l’abri des rochers avant même de savoir que nous y fussions.

— « Observons ! » dit le géologue.

— « Observons. »

Les animaux titans passent à la file indienne, silhouettés le long du tranchant. Ils s’enlèvent en découpures sombres. Leurs défenses se distinguent mal ; Fleury-Moor, qui est myope, prétend qu’il en voit quatre par individu. Je tiens pour deux, et courbes.