Page:Retté - Le Symbolisme. Anecdotes et souvenirs.djvu/19

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

LE SYMBOLISME 7

leur individualisme excessif et réfractaire à toute discipline. Enfin on les accuse d'avoir exalté, comme géniaux, des poètes dont le talent marquait plus de bizarrerie que d'humanité profonde.

Ces critiques viennent un peu tard. J'ai peut-être plus qu'un autre le droit de le dire. Car, sans vouloir me poser en précurseur ou en méconnu, il m'est difficile d'oublier qu'à une époque où naturistes, humanistes et écoliers français étaient, je pense, encore au collège, j'ai combattu chez les écrivains de ma génération, le goût de l'artificiel et de la rêverie stérile dans cette tour d'ivoire qu'on voudrait remplacer par une tribune de réunion publique. J'ai publié des poèmes, entre autres Similitudes et la Forêt bruissante, où l'on voulait bien reconnaître une inspiration altruiste. Il se peut que j'ai contribué par mes campagnes de critique à orienter mes émules vers le panthéisme et l'amour de la nature. Enfin j'ai dénoncé cent fois, avec une vivacité que certains ne me pardonnent pas, l'influence néfaste de feu Stéphane Mallarmé. — Cela m'a même valu, de la part de M. André Gide, une bulle d'excommunication qui fut apostillée par quelques mallarméens enthousiastes.

Mais que reste-t-il aujourd'hui de Mallarmé? — Le souvenir d'un excellent traducteur des poèmes d'Edgar Poe, d'un causeur subtil et d'un poète