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LETTRE DE PAUL, ÉVÊQUE DE SAÏDA,


moine d’antioche, à un musulman de ses amis demeurant à saïda.



Cher ami,


Que Dieu nous accorde à tous la grâce de juger sainement des choses, afin de discerner avec sûreté les œuvres qui doivent nous conduire au paradis et nous éloigner des flammes de l’enfer.

Ainsi donc, ami plein de tendresse et de bienveillance, frère bien-aimé (que Dieu prolonge tes jours dans le plus parfait bonheur, qu’il te garde contre les maux de cette vie et dirige tes pas !), je t’ai déjà parlé de mon voyage au pays des Grecs, à Constantinople, en Moldavie, dans plusieurs régions franques et à Rome ; je t’ai dit que grâce à la dignité épiscopale dont je suis honoré, je me suis mis en relation avec les principaux personnages et les chefs de ces pays, et que j’ai eu des entretiens avec les plus distingués d’entre eux par le rang et par la science. Tu m’as prié alors de t’exposer clairement ce que pensent de votre prophète Mohammad ceux que j’ai vus et entretenus. En considération de notre amitié et de la profonde affection qui nous lie, je réponds donc aujourd’hui à ta demande.

(Or telle a été la première déclaration des gens en question.)

— À la nouvelle qu’un homme, appelé Mohammad, se disant l’envoyé de Dieu, avait paru parmi les Arabes, leur apportant un livre qui, disait-il, lui avait été révélé du ciel, nous sommes parvenus à nous procurer cet écrit.

— Pourquoi donc, leur dis-je alors, ayant entendu parler de cet envoyé et ayant eu soin de vous procurer son livre, pourquoi ne vous êtes-vous point faits ses disciples ? On lit en effet dans le Coran : « Quiconque suit une religion autre que l’islam, ne peut voir son culte agréé de Dieu, et il sera dans l’autre monde du nombre des réprouvés[1] »

  1. Sour. iiie, v. 79. Le texte du Coran porte arabe (désire) au lieu de arabe (suit) qu’emploie le manuscrit.