Page:Revue de métaphysique et de morale, numéro 6, 1912.djvu/27

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LA NATURE DE L’ESPACE ̃Ier article. LES CONCEPTIONS EMPIRISTIQUES DE L’ESPACE I. L’ESPACE CHEZ DESCARTES. Nous ne rappellerons que pour mémoire la définition de ces mots empirisme et nativisme appliqués à la perception de l’espace ou d’une étendue. L’empirisme suppose qu’une étendue donnée, si petite qu’elle soit, est perçue successivement, et que la connaissance de la grandeur de l’étendue totale ne nous est donnée qu’après que cette étendue a été parcourue en entier, et par une synthèse des parties qu’opère l’esprit. Le nativisme soutient que dans notre représentation le tout est avant les parties, qu’il n’est donc pas la somme des parties mais leur principe, en ce sens que les parties sont en lui et non pas lui en elles. Il va de soi que ces deux conceptions de l’espace ne portent pas seulement sur la manière dont nous le percevons, mais aussi sur son être et sur sa nature, attendu que l’espace de notre perception et le véritable espace ne font qu’un. Il n’y a qu’une manière de concevoir nativistiquement l’espace, mais il y a bien des manières de le concevoir empiristiquement. On peut dire que chacun des philosophes empiristiques a sur l’espace sa conception propre. Descartes parle très peu de l’espace, comme s’il l’ignorait; il ne paraît connaître que l’étendue, dont il fait la matière première créée par Dieu et la substance commune de tous les corps. D’ailleurs il ne limite pas l’étendue, ni ne la détermine qualitativement; il la solidifie seulement un peu, puisqu’il faut qu’on la perçoive, tout en lui conservant le caractère idéal, puisqu’elle doit rester parfaitement intelligible. Ces deux exigences de solidité et d’idéalité sont-elles conci-