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GRÈCE.

Chaque île forme un cadilyk ou nahiïè (canton judiciaire), dans lequel est censé résider un cadi ou un naïb, qu’on nomme chaque année pour entrer en fonctions le 1/13 mars. Partout où il y a des musulmans, la justice ne peut être exercée et rendue que par un juge musulman ; mais ailleurs, le cadi même ne prononce que sur l’avis des Kodja-bachis et des supérieurs ecclésiastiques grecs, en conformité de certains priviléges (ahd-namè), concédés à l’époque de la conquête des îles, ou de leur soumission à la puissance ottomane. C’est ce que prouve le Bérat ci-après[1], qui fut accordé par Murad iii, en 1580, à plusieurs îles de l’Archipel, à l’instar des priviléges déjà octroyés à Scio, par Sultan Suleïman.

Avant 1812, époque du traité de Bucharest entre la Sublime Porte et la Russie, les Grecs pouvaient être revêtus du titre d’agas et de vaïvodes ; ils achetaient cette faveur au poids de l’or, et en abusaient d’ordinaire. Depuis, la Porte a interdit ces choix, non sans y avoir mûrement réfléchi ; elle a voulu que désormais il n’y eût que des musulmans dans ces places.

L’aga préside le conseil des primats ; ces magistrats, nommés annuellement par la communauté, règlent et répartissent les impôts, et sont chargés de tous les détails de l’administration intérieure ; ils terminent aussi la plupart des affaires civiles et contentieuses, dont au besoin on forme appel à l’amirauté de Constantinople et au tribunal du grand-vézir. Le drogman de l’arsenal exerce sur eux une grande influence, et en retire beaucoup d’argent en cadeaux volontaires ou extorqués par la crainte.

Il n’a pas été possible de recueillir des renseignemens posi-

  1. En rapprochant ce Bérat et le tableau suivant du Bérat d’investiture du Patriarche grec de Constantinople, que nous avons déjà publié dans le 1er volume de la Revue (p. 159), nos lecteurs seront à même de juger encore mieux si on ne pouvait pas dire avec quelque fondement « que la nation grecque forme comme une immense république dans l’empire des sultans. »