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PÉROU.

songer à son bien-être, sans éprouver la crainte de voir sa tranquillité troublée, et le gouvernement s’occupa de cicatriser les blessures que lui avait faites le général Bolivar, de recruter ses forces qu’il avait diminuées considérablement, et d’arracher le pays à l’état de dégradation où il était tombé, pour lui rendre la position respectable et l’influence d’une nation libre. Mais des appréhensions nouvelles et bien fondées vinrent troubler la paix. Le général Sucre[1] essaya de démembrer nos départemens méridionaux, en suggérant aux chefs qui les commandaient de les constituer en république indépendante, et de coopérer avec le Bolivia.

Le gouvernement eut les yeux fixés incessamment sur les opérations secrètes du général, et conjecturant qu’il se tramait quelques nouvelles machinations, après l’échec de la première, il découvrit qu’il avait des communications avec l’agent de la Colombie dans cette capitale, et qu’il lui avait remis des fonds destinés à un tout autre usage qu’on ne le supposait généralement. Le gouvernement fut alors convaincu qu’il serait dangereux de tolérer le séjour de ce ministre soupçonné de conspirer contre le nouvel ordre de choses, et connu pour son influence sous l’absolutisme de Bolivar qu’il avait intérêt à soutenir et à rétablir. Le gouvernement péruvien se vit donc dans la nécessité d’user du droit commun à toutes les nations, c’est-à-dire d’expulser un ministre étranger qui faisait planer sur lui des soupçons fondés, et, en conséquence, il lui ordonna de quitter le territoire.

Armero, ancien agent de Bolivar et son confident intime, ne pouvait et ne devait pas avoir la permission de rester dans le pays après que la Providence avait accordé au Pérou le pouvoir de briser le joug de l’oppression. Ce fut plutôt un excès de considération que le Pérou manifesta pour la Colombie, en respectant le caractère de son re-

  1. Président de la nouvelle république de Bolivia (qui se compose des provinces du Haut-Pérou).