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SAMBOANGAN.

nous fûmes à plusieurs reprises poursuivis par des buffles, dont les bois sont remplis. Un jour j’étais seul, ayant perdu mes chasseurs, absorbé dans mes herborisations ; je cueillais des fleurs et des graines sur des arbrisseaux formant un bosquet de bois assez touffu, lorsque tout à coup je fus distrait de mes occupations par un bruit sourd qui paraissait approcher ; je me retournai promptement, et je vis venir à moi trois buffles énormes, qui se suivaient, portant le nez en l’air et marchant à grands pas. Je me sauvai à toutes jambes, et franchis une haie servant de clôture à un champ de riz, qui se trouva heureusement assez près de moi, au moment où j’allais être atteint par ces animaux. Je n’avais pas eu le temps de renfermer ma boîte de fer-blanc qui était demeurée accrochée à un buisson. Les buffles, le nez appuyé sur la palissade, me mangeaient des yeux. Ils finirent probablement par s’ennuyer, et s’en retournèrent quelques minutes après. Ma frayeur calmée et le danger passé, je fus chercher ma boîte de fer-blanc, et je continuai mes recherches, non sans retourner quelquefois la tête pour regarder si je n’aurais pas encore quelques buffles à mes trousses.

Le nombre de ces animaux est considérable dans les forêts de Samboangan. Un habitant, parent du gouverneur de cette ville, m’assura qu’on en voyait souvent des troupeaux de quatre-vingt et cent têtes. Ils rendent ces parages difficiles et dangereux pour les naturalistes ; cela est d’autant plus fâcheux, que je n’ai pas vu de contrée plus riche en espèces et en genres de végétaux nouveaux, et généralement en objets d’histoire naturelle. Les oiseaux y sont brillans en couleurs, très-abondans et la plupart inconnus. Il est présumable que je suis le premier naturaliste qui ait un peu visité cette