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VOYAGES.

Comme il était tout-à-fait impossible d’entrer dans le golfe, notre goëlette et le Palinure jetèrent l’ancre dans la baie de Foglieri, située sur les ruines de l’ancienne Phocée, de cette cité qui colonisa Marseille. Placée à l’extrémité occidentale du golfe de Smyrne, elle offre un vaste et excellent mouillage, parfaitement abrité de tous les points du compas. Elle est défendue par un château-fort, situé à droite du canal, et par les remparts de Foglieri. Je ne sais si déjà je me trouvais sous l’influence d’un prestige, mais ce petit hâvre me parut charmant : ses cyprès s’allient si bien aux minarets qu’ils avoisinent, il y a dans cet ensemble quelque chose de si oriental, que l’on s’aperçoit facilement de la transition de l’Europe à l’Asie.

La possession de Foglieri serait, en cas de guerre, un point fort important. Ce port est d’une très-facile défense ; il commande l’entrée du golfe de Smyrne, tient en observation les îles de Samos et Mételin, et peut même servir utilement en cas de blocus des Dardanelles, puisque Ténédos n’offre qu’un mouillage peu sûr et mal abrité.

Nous descendîmes à Foglieri vers le soir. Notre intention était de faire une visite au bey. Il était à la campagne. Nous parcourûmes ensuite les environs dans l’espoir de retrouver quelques ruines de l’ancienne Phocée ; nous ne découvrîmes, au milieu de l’amas irrégulier de petites maisons turques que renferment ces murs, aucun vestige d’antiquité. Mais par l’examen des localités, nous reconnûmes l’erreur des géographes qui supposent que l’emplacement de Foglieri pouvait former une île, et appartenir à l’ancienne Leuce ; l’aspect du pays rend cette hypothèse complètement inadmissible.