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CONSTANTINOPLE EN 1831.

rentieusement escortée par des gardes turcs. Les Musulmans ont laissé au tombeau de Jésus, au mont des Oliviers, sa sainteté.

Jusqu’à la réforme de Luther, les chrétiens furent peut-être au-dessous des sectateurs de Mahomet : les armées de ces derniers tinrent long-temps toute l’Europe en échec. Les tapis de Smyrne, les riches étoffes de Brousse, les laines d’Angora, les armes de Damas, étaient le luxe de nos cours, de nos châteaux. Partout, dans l’Orient, on voyait s’élever des fondations pieuses, les mosquées avec leurs bibliothèques, leurs écoles, leurs hospices, les khans aux lourds piliers de pierres, les caravansérails aux arcades orientales, et les kiosques chinois. Sur un sentier écarté, au milieu d’un bois, le voyageur découvrait souvent, dans une délicieuse surprise, une fontaine de marbre brillante de sculptures d’or et d’azur, qu’une pieuse sultane avait consacrée au prophète. — Le repos des morts était ombragé par des cyprès, et celui des vivans par des platanes. — La danse, la musique, les chants étaient cultivés par les derviches, et l’on admirait la délicatesse de leurs peintures sur étoffe.

La religion mahométane présidait à tous les actes de la vie, et quand au mois de mai, l’on quittait la pelisse de fourrure pour la robe de châlit, et quand l’on allait en guerre, ou qu’il était prescrit, dans un temps de détresse, de n’avoir plus que six plats à sa table. Cette religion était un système spirituel et matériel comme le saint-simonisme ; elle ralliait toutes les forces de l’homme. La domesticité ne retranchait point une classe entière de l’ordre politique : l’esclave de la veille, qui apportait au visir, en se courbant, la pipe et son plateau de cuivre, se trouvait le lendemain vêtu d’un