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CONSTANTINOPLE EN 1831.

ont essuyé, sans reculer d’un pas, le feu de trois batteries et les charges réitérées de la cavalerie. Ces enfans tombèrent à leurs rangs sur le champ de bataille, couchés comme des gerbes de blé.

Il faut le dire encore, entourés de l’abjection des Juifs, de la lourdeur et de l’égoïsme des Arméniens, de la fourberie des Grecs, les Turcs se sont conservés plus simples, plus purs qu’on ne devait l’espérer ; car la filouterie, le vol, sont inconnus parmi eux, et un jour qu’un fratricide avait été commis, le peuple resta consterné, sans force ; l’assassin disparut, il avait commis un crime nouveau. Ensuite, n’ayant pu guère nous connaître pratiquement que par les intrigues et la corruption des Levantins, faux Européens, gens sans patrie véritable, sans devoirs, et par conséquent sans garanties ; ayant à lutter contre les sales jalousies et les défiances réciproques des différentes diplomaties, les Musulmans ont dû ressentir peu d’affection pour l’Europe, rester dans l’incertitude, l’inertie, et mal comprendre même les intentions si loyales de la France pour la régénération ottomane.

Mahmoud, élève de Sélim, sultan que les Grecs autrefois employés à la Porte initièrent dans les idées européennes, est sans doute l’expression des besoins de son temps ; mais il ne peut être ce que fut Pierre le Grand, dont il a étudié, dit-on, la vie. On reconnaîtra toujours en lui le Turc, l’homme du sérail. Le czar n’était pas embarrassé comme lui dans les replis d’une religion qui enlaçait tous ses pas, et ce n’était pas né dans une ignorance totale qu’il prêchait la civilisation à son peuple. — Examinez dans quelle cour Mahmoud a vécu ; les officiers de compagnie de S. H. en sont encore aux temps du xive siècle, aux beaux jours de l’alchi-