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thousiasme que l’empereur avait excité en Espagne, avant le voyage de Bayonne, un de nos plus jeunes camarades, qui, baptisé en 1804, avait reçu de son père, devenu en 1810 membre du parti exalté des Cortès de Cadix, le prénom de Napoléon.

Les seules décorations qui se fissent remarquer dans la foule brillante qui nous entourait, étaient, avec l’étoile de la légion d’honneur et la couronne de fer, les ordres royaux de Naples et d’Espagne, créés tous les deux par Joseph. La croix de Naples, surmontée d’un aigle d’or aux ailes déployées, se portait suspendue à un ruban bleu de ciel. La croix d’Espagne, simple étoile à cinq rayons émaillée de rubis, s’attachait à un ruban rouge ; c’était une sorte de légion d’honneur espagnole.[1]

Ce fut avec surprise que je vis entrer dans la salle du trône un petit vieillard à cheveux blancs, encore agile et droit, malgré son âge, revêtu d’un grand uniforme de maréchal-de-camp espagnol,

  1. L’ordre royal d’Espagne avait d’abord été institué par le roi Joseph, le 20 octobre 1808, sous le titre d’ordre royal et militaire. Ce dernier mot fut supprimé par le décret d’organisation du 18 septembre 1809, et les officiers civils devinrent, comme les militaires, aptes à porter la décoration de l’ordre royal. Cet ordre devait se composer de cinquante grands cordons sans revenu fixe, mais pouvant posséder des commanderies ; de deux cents commandeurs jouissant d’une pension annuelle de 30,000 réaux (7,500 fr.) ; et de deux mille chevaliers, avec une pension de 1,000 réaux (250 fr.) par an.

    La décoration, suspendue à un ruban rouge, était une étoile d’or à cinq rayons, surmontée d’une couronne ; les rayons émaillés en rubis. Sur l’une des faces du centre de l’étoile, on voyait le portrait du roi Joseph, et sur l’autre les armes d’Espagne avec cette inscription : Virtute et fide. Les grands-cordons portaient en outre au côté gauche une plaque à rayons d’argent.

    Joseph avait conservé les armes d’Espagne, telles qu’elles existaient sous Charles iv ; seulement l’aigle impériale avait remplacé, au milieu de l’écusson, les trois fleurs de lys. C’était ainsi qu’à l’avènement de Philippe v, les fleurs de lys avaient elles-mêmes pris la place de l’aigle à deux têtes de Charles-Quint.

    Pour former une dotation à son ordre royal, Joseph supprima, par un décret daté aussi du 18 septembre, tous les ordres civils et militaires existant en Espagne, à l’exception de celui de la Toison d’or. Ces ordres étaient : celui de Charles iii, récemment institué et devenu le premier de tous, les ordres anciens et fameux de Saint-Jacques, de Calatrava, de Montesa et d’Alcantara. Une disposition du décret étendait la mesure de suppression aux langues de l’ordre de Malte.