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DE LA LÉGISLATION ANGLAISE SUR LES CÉRÉALES.

l’importation des grains étrangers, en conservant cependant à l’agriculture indigène la protection qui lui est due, et, en donnant de plus grandes facilités à l’échange qui est la base du commerce, d’ouvrir de nouveaux débouchés aux produits de l’industrie nationale. Or, nous croyons que non-seulement un droit fixe et permanent de 8 shell. par quarter, tel que le proposait lord John Russell, protégerait suffisamment l’industrie agricole, mais que l’établissement d’un droit fixe plus élevé, de 12 shell., si l’on veut, amènerait pour l’industrie manufacturière des résultats plus avantageux que n’en peut produire le maintien d’un droit mobile, si bas qu’il puisse descendre. Le premier principe des transactions commerciales, c’est la sécurité ; et dans des relations internationales bien ordonnées, c’est la fixité et non pas le plus ou moins d’élévation des tarifs qui détermine l’activité de l’échange. Les résultats obtenus depuis cinq mois par l’opération de la nouvelle loi des céréales viennent à l’appui de cette assertion. Pendant les quatorze dernières années, la moyenne du blé étranger importé en Angleterre avait été de 1 million de quarters, qui, en payant un droit moyen de 5 shell.d., avaient produit pour le trésor un revenu annuel d’environ 300,000 liv. Sous l’opération de la nouvelle loi, depuis le 1er  avril jusqu’au mois de septembre, la somme de l’importation a été, en cinq mois, plus que double de ce qu’elle avait été précédemment dans une année moyenne. Elle s’est élevée à 2,457,931 quarters, qui, en payant un droit de 8 shell.d., ont produit pour le trésor, dans l’espace de cinq mois, un revenu de 974,021 liv.

En face de cette irruption extraordinaire des grains étrangers, on pourrait croire que le prix du blé indigène a éprouvé une forte baisse, et que les fermiers anglais ont été sensiblement atteints par les effets de la nouvelle mesure. Il n’en est rien. Le prix du blé n’a point baissé ; il est au contraire resté plus élevé qu’il ne l’avait été pendant les quatorze dernières années. De 1828 à 1842, le prix moyen avait été de 59 shell. ; pendant les quatre derniers mois qui viennent de s’écouler, il a été de 62 shell., et cette élévation surprenante s’est maintenue malgré l’abondance de la dernière récolte et malgré la concurrence d’une somme énorme d’importations. Ainsi, jusqu’à présent, la loi a opéré admirablement ; elle a accru la circulation des grains et par conséquent la consommation ; elle n’a point fait baisser les prix, et par conséquent n’a point diminué les bénéfices des fermiers ; enfin, et cette dernière considération n’est pas à dédaigner