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progrès sur son prédécesseur. Les progrès, qui procèdent autant de l’expérience que de la science, ont pour conséquence inévitable la variété des essais : il en résulte quelquefois des déceptions ; cependant de tous les bâtimens qui n’ont pas complètement réussi, on a tiré encore un assez bon parti, car tous rendent des services dans la flotte, tandis que nous voyons en Angleterre plusieurs de ces essais malheureux qui n’ont même pas pu faire une traversée. On ne pourrait en citer qu’un seul de ce genre en France.

Croit-on que les Anglais n’ont pas une plus grande multiplicité de types que nous, non-seulement de bâtimens à vapeur, mais aussi de bâtimens à voiles ? Nous avons en France un système de construction nationale qui date de longues années, nous avons les traditions d’un corps du génie depuis long-temps organisé. Les Anglais ne jouissent d’aucun de ces avantages. Jusque dans ces dernières années, aucun système fixe de construction n’existait ni dans leurs traditions, ni dans leurs règlemens. Dans l’embarras du choix entre les divers modèles étrangers dont leurs arsenaux se peuplaient pendant la guerre, ils en étaient encore naguère à construire un bâtiment sur les plans de tel ou tel navire, français, danois, espagnol, hollandais. Des modifications étaient bien de temps en temps apportées à ces plans par quelque marin ou quelque charpentier ; mais on ne s’était encore arrêté à aucun plan fixe, et la diversité des bâtimens exigeait une diversité d’armemens fort dispendieuse. À Trafalgar, Nelson avait sept espèces différentes de vaisseaux de 74. La même diversité existe encore aujourd’hui. Les tâtonnemens nécessités pour la construction des vapeurs ont apporté un accroissement notable à ce nombre de types, et actuellement il est presque double de celui qui existe dans la marine française. À une certaine époque, nous nous sommes lancés, il est vrai, sans réflexion et sans expériences préalables dans de vastes constructions dont on a désespéré long-temps de pouvoir tirer parti ; cependant, grace à des essais et à des améliorations successives, elles finiront par constituer un de nos meilleurs élémens de combat. De même les Anglais ont entrepris presque en aveugles de nombreuses et grandes constructions de navires en fer, qu’ils condamnent ouvertement aujourd’hui. Plus prudens et éclairés par quelques expériences, nous ne les avons suivis dans cette voie qu’avec une heureuse réservé, et nous n’avons qu’un nombre minime de petits bâtimens en fer qui remplissent parfaitement leur but, celui de faire le service d’avisos.

Les journaux anglais sont pleins de détails sur les expériences journalières faites sur les bâtimens à vapeur ; mais il ne faut pas toujours croire aveuglément aux programmes qu’ils publient des expériences de vitesse de ces bâtimens. Les choses de la marine étant là familières