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IV

Aucune circonstance ne pouvait être plus favorable au comité des trente. C’est le 23 avril que le comité fit connaître ses plans à l’assemblée. Les discussions des premières séances furent assez calmes, les projets assez sages, les votes assez mûrement réfléchis ; mais bientôt la modération fut étouffée par la violence, et la gauche reprit l’avantage. Que voulait-on d’abord ? Envoyer des commissaires auprès de tous les gouvernemens qui refusaient d’admettre la constitution. Rien de plus sensé ; c’était par la diplomatie, c’était en des conférences sérieuses que le ministère de l’empire devait essayer de se mettre d’accord avec les différens cabinets. Le choix des commissaires indique très bien l’excellent esprit qui présidait à ces missions ; M. Bassermann fut envoyé à Berlin, et M. Mathy à Munich. Malheureusement, la lutte, devenue chaque jour plus vive, ne permit pas qu’on donnât suite à ces pacifiques mesures. M. Bassermann allait partir quand on apprit la dissolution de la seconde chambre prussienne et la formation d’un camp de quarante mille hommes à Creuznach. Le rôle des commissaires devenait singulièrement difficile ; il l’était d’autant plus que M. de Gagern se décidait à faire la plus énergique résistance, sans pourtant sortir des voies légales. Quant à la gauche, les menaces et les coups d’état lui venaient en aide. Le 27 avril, une proclamation ainsi conçue était affichée sur tous les murs : « La patrie est en danger ! les chambres prussiennes sont dissoutes. Des troupes sont rassemblées à Creuznach ; pour octroyer une constitution, en effet les troupes sont nécessaires. Le despotisme renversé au mois de mars 1848 veut livrer sa dernière bataille. Il faut enfin, il faut que Francfort agisse ! Qu’aucun député ne s’éloigne, que tout absent revienne au plus tôt ! Les assemblées populaires des environs ne seront pas étonnées, si, dans de telles circonstances, les membres du parlement ne paraissent pas au milieu d’elles. » MM. Raveaux, Vogt, Nauwerck, Freese, Eisentück, Claussen et plusieurs autres encore avaient signé cet ordre du jour, qui présageait les tempêtes.

Ces députés absens que rappelait la proclamation, du 27, ces députés présens à qui elle enjoignait de ne pas quitter leur poste, ce n’étaient pas, on le devine sans peine, les représentans de l’Autriche, ce n’étaient pas M. de Schmerling et ses amis. Ceux-là, bien au contraire, obéissant à l’ordre de leur gouvernement, avaient déclaré que leur mission était finie. À chaque séance, le président annonçait le départ de quelques députés nouveaux ; c’étaient les Autrichiens d’abord, ce furent bientôt les Bavarois, ce furent enfin, parmi les représentans des autres pays, tous ceux qui ne voyaient pas d’issue légale pour sortir d’une