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qui mènent à toutes les fautes en retenant toutes les sympathies. Quand il prit le trône, c’était un jeune homme grave, instruit, modéré, humain brave, romanesque. « Il était, dit mistriss Hutchinson, la chroniqueuse puritaine, tempéré, chaste et sérieux. Les courtisans dépravés, qui ne pouvaient abandonner leurs débauches, respectaient le roi au point de se retirer dans des coins pour s’y livrer. Tous les bouffons de l’ancienne cour furent bannis, et des hommes de science et de talent encouragés par le roi, qui était un excellent juge. » Ses ennemis, Lilly, May, disent que « l’amour et l’estime le suivirent au trône, que sa vie fut plus conforme aux règles de la religion protestante que celle d’aucun prince de l’Europe, qu’il était parfait ami, père indulgent, ennemi du sang répandu. » Le sévère covenanter écossais Baillie écrivait de lui : « C’est une très juste, raisonnable et douce personne. » Le régicide Henry Martyn disait enfin après sa mort, dans la chambre des communes : « Si nous devons avoir un roi, j’aurais mieux aimé le dernier gentleman que tout autre. » Mais nous avons un témoin toujours parlant de l’attachante distinction et du charme de ce prince infortuné, c’est le portrait de Van Dyck. Dans un de ces mauvais momens où, à force d’être whig, on dirait qu’il se croit membre du long parlement, M. Macaulay a écrit, avec une sorte de dépit contre le peintre des cavaliers, que Charles Ier devait au portrait de Van Dyck la pieuse et romantique popularité qu’il a conservée jusqu’a nos jours. Qui a pu passer en effet sans attendrissement devant cette tête où la tristesse des pressentimens tragiques voile la fierté de la couronne ? Qui a pu résister à l’attrait de cette chevaleresque attitude ? Qui a pu rester froid devant cette délicate figure mélancolique et rêveuse comme celle d’un amant malheureux, sous ce regard bleuâtre et vague où se lisent les mortelles indécisions et les folles témérités d’une ame faible ? Pauvre roi, avec sa main fièrement campée sur la hanche et l’autre mollement posée sur sa canne ! Lorsqu’il fut devant le tribunal des régicides il s’appuyait aussi sur une canne : la tête se détacha sous sa main ; il lut le sort qui l’attendait dans ce présage. Que M. Macaulay ne dise point que c’est le peintre qui prête sa séduction au prince. Le tableau de Van Dyck nous révèle la fascination que Charles Ier exerça sur tant d’ames poétiques et généreuses ; il nous explique comment le brave Montrose, à la seule vue de Charles, quitta le covenant et se jeta dans la cause royale ; il justifie les infatigables dévouemens qui allèrent, jusqu’au martyre ; il fait comprendre l’histoire.

Entre Charles Ier et ses parlemens, les tricheries furent mutuelles, les empiétemens réciproques. Charles avait besoin d’argent pour soutenir ses guerres imprudentes et malheureuses avec la France, avec l’Espagne, avec ses sujets écossais. Ses parlemens ne lui accordaient que des subsides insuffisans, et mettaient pour prix à leurs votes des