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Eux qui détestaient les clochers au sommet des vieilles églises, ils en portaient sur leurs têtes sous forme de chapeaux pointus. Ils s’allongeaient la figure par piété et la prolongeaient au moyen d’un mince rabat tel que ceux que portent nos prêtres. Comme ils avaient horreur des boucles d’amour, ils se tondaient ras. Ils cachaient leur linge, portaient des vêtemens sombres, étroits, serrés, courts. Au lieu du haut-de-chausses large et frangé du cavalier qui s’immergeait richement dans la botte, le tête-ronde arrêtait maigrement sa culotte au genou. Ces personnages raides, moroses, nasillards, paraissaient grotesques aux cavaliers dans le commencement de la guerre surtout, lorsque ceux-ci les voyaient fuir devant eux, ce qu’ils faisaient toujours dans les premières rencontres ; mais, plus tard, quand ces maladroits eurent acquis la discipline que les cavaliers dédaignèrent, quand ils furent transformés en cuirassiers irrésistibles et impénétrables, quand ils devinrent les « côtes de fer » de Cromwell, ou les « homards » de Hazelrig, un poète cavalier disait : « Ces hommes qui reniflent des psaumes se battent comme des diables. »

En dépit de la sévérité de leur habit et de l’affectation de leurs postures, les têtes-rondes étaient infectés des vices qu’ils reprochaient le plus à leurs joyeux adversaires. Ils avaient aux premiers rangs de leur sainte congrégation des impies, des débauchés, tels que Pym, Marten, Wharton, Warwick, Pembroke. Rien n’est curieux et instructif comme de les voir se juger les uns les autres lorsqu’ils eurent détruit les fils de Bélial et dépouillé les prêtres de Baal. Voici comme Denzil Holles parle de ses anciens associés : « Les plus médiocres des hommes, les plus bas et les plus vils de la nation, ont pris le pouvoir dans leurs mains. Ils ont foulé aux pieds la couronne, bafoué le parlement, supprimé la noblesse et la gentry, opprimé les libertés du peuple en général, rompu tous les liens de religion, de conscience, de foi, de devoir, de loyauté et de bonnes mœurs, rejeté toute crainte de Dieu et de l’homme : faisant de leur volonté leur loi, de leur pouvoir leur règle ; élevant, pour fin de leurs actions, une Babel de confusion. » Un autre zélé parlementaire, Clément Walker, écrivait : « La cupidité, agissant sur la fragilité humaine des chefs et des orateurs des chambres, les entraîna à mêler au bien public leurs intérêts particuliers et leur ambition. Ils ont monopolisé les profits et les places. Lorsqu’il est question de donner quelque bénéfice ou quelque emploi, on voit un indépendant puissant le demander pour un presbytérien, ou un presbytérien influent pour un indépendant : c’est ainsi qu’ils se partagent la république. » L’honnête Fairfax, le général parlementaire, écrivait en 1648 : « Hélas ! quand ma pensée se reporte sur les tristes conséquences que des hommes rusés et ambitieux ont données à ces premières et innocentes entreprises, je suis prêt à perdre la confiance