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mieux assurément d’amortir sa dette, ou d’accorder une remise d’impôt aux contribuables, que de multiplier encore les voies de fer ou les voies d’eau.

Nous avons admis que le découvert de l’année 1849 excéderait 260 millions, et que le découvert total à supporter par la dette flottante s’élèverait à 630 millions dès le début du prochain exercice. Convient-il aujourd’hui, pour diminuer cette dette, d’en consolider unie partie et d’adjuger, ainsi que le demande M. le ministre des finances, un emprunt de 200 millions ? L’opération ne me paraît ni opportune ni nécessaire. Je dirai pourquoi.

L’excédant des recettes sur les dépenses, en 1850, peut servir, dans mes prévisions, à diminuer le découvert de à 30 millions. Sur les 600 millions qui restent, 50 sont dus à la Banque le France à titre d’avances, et la Banque n’en réclame pas le remboursement immédiat. Il a plus, aux termes du traité qu’elle a conclu avec l’état, l’état peut lui demander encore 100 millions que la Banque, voyant ses escomptes se restreindre, s’estimerait heureuse de prêter. Ce serait, en attendant mieux une conversion partielle de la dette flottante, qui se trouverait réduite ainsi à 500 millions. L’état, en augmentant l’étendue de ses obligations à l’égard de certains établissemens publics, diminuerait celle de ses obligations vis-à-vis des particuliers. La position du trésor gagnerait en sécurité et en indépendance.

Sans doute, il est difficile d’ajourner indéfiniment l’emprunt ; mais on peut attendre. Un emprunt de 200 millions, contracté aujourd’hui au taux probable de 82 fr. pour 5 fr. de rente, grèverait le budget d’une charge annuelle de 12,700,000 francs, tandis qu’en le renvoyant à des temps meilleurs, on contracterait à 90, à 95 francs, peut-être même au pair.

Il y a une raison plus décisive encore de différer l’emprunt : c’est que le fonds disponible des capitaux auxquels s’adresse l’état, quand il emprunte, est le même qui subvient aux entreprises de l’industrie privée, et que ce fonds, aujourd’hui, n’est rien moins qu’inépuisable. Ne recommençons pas les fautes de la monarchie. Le gouvernement de juillet, au moment où il inondait le marché d’actions de chemins de fer, ouvrit un emprunt de 200 millions, et, au lieu d’assister le crédit des compagnies, leur fit une concurrence qui devait être fatale à tout le monde. On en vint à demander a la place de Paris jusqu’à 60 millions par mois, et il en résulta que les prêteurs, comme les actionnaires, étant obligés d’emprunter pour acquitter leurs engagemens, tous les ressorts du crédit se tendirent jusqu’à se rompre.

Si l’état appelle aujourd’hui les compagnies à s’associer à l’œuvre des chemins de fer, il ne doit, dans son propre intérêt, leur enlever aucune de leurs chances. S’il veut que ces entreprises trouvent de