Page:Revue des Deux Mondes - 1849 - tome 4.djvu/70

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Quant au nouveau mode d’emprunt à terme que propose M. Passy, je ne puis m’empêcher de trouver la conception très malheureuse. Si M. le ministre des finances venait résolûment nous conseiller de changer la forme de notre dette flottante et de convertir les bons du trésor en bons de l’échiquier, il y aurait encore à examiner si ce qui est possible en Angleterre l’est également en France ; mais créer une seconde dette flottante à côté de la première, émettre à la fois des bons remboursables à des échéances déterminées et des obligations que l’on rachèterait annuellement au moyen d’un amortissement de 2 pour 100, c’est s’exposer à voir l’une ou l’autre de ces combinaisons dédaignée par les capitalistes, l’une ou l’autre de ces sources frappée sur l’heure de sécheresse et de stérilité. Le ministre lui-même a la bonne foi de reconnaître que « les obligations nouvelles, à leur origine, n’entreront qu’avec peine dans la circulation. » Quelle peut être dès-lors la valeur de ce système quand il s’agit de mettre un terme à des embarras pressans ? Pour aligner sur le papier des théories dont le résultat est incertain ou éloigné, il faut avoir le temps d’attendre.

Toutes choses restant ce qu’elles sont, l’exposé du ministre évalue les dépenses de 1850 à 1,591 millions, et les recettes à 1,271 millions. Les changemens indiqués par le ministre, changemens qui consisteraient à réduire les dépenses de 182 millions, et à augmenter les recettes de 144 millions, ramèneraient à un équilibre apparent notre situation financière : les dépenses, en effet, sont évaluées à 1,408 millions, et les recettes à 1,415 ; une faible marge de 7 millions est laissée aux crédits supplémentaires que comporte le chapitre de l’imprévu.

La diminution des dépenses s’opère, dans ce plan, avec une facilité qui pourra faire supposer qu’elle n’est que nominale. En effet, M. le ministre des finances annule les rentes converties, qui représentaient un total d’environ 70 millions, ce qui n’a d’autre résultat que de simplifier les écritures et de faire disparaître du budget une véritable fiction ; mais les dépenses réelles n’en sont nullement réduites, attendu que ces réserves de l’amortissement ne servaient plus à l’extinction de la dette. On régularise ainsi, on élague les branches parasites de la comptabilité budgétaire ; il n’y a là rien de plus ni rien de moins.

J’en dirai autant des 103 millions qui représentent la dépense annuelle des travaux extraordinaires. On les fait passer d’un budget à un autre ; on donne un autre nom à cette allocation, qui n’en reste pas moins nécessaire tant que les compagnies ne sont pas appelées à y concourir avec l’état ; on ne parvient ni à la supprimer ni à la restreindre.

L’accroissement des recettes est beaucoup plus réel. M. Passy ajoute d’abord aux ressources de l’état les 65 millions composant la dotation de l’amortissement, dont il suspend ainsi l’action jusqu’à nouvel ordre. Cette mesure paraît rationnelle, et elle était inévitable. On amortit sérieusement