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années les fonctions de sous-directeur aux affaires étrangères, qui est honoré de l’amitié de M. Guizot et qui ne l’a jamais désavouée, avait également été destitué après la révolution de février. L’estime générale dont il jouissait, la capacité qu’il avait montrée dans les diverses négociation commerciales qu’il avait conduites avec les puissances du Nord, l’avaient déjà fait replacer à Rotterdam ; il a été récemment appelé au consulat-général d’Anvers, où ses connaissances spéciales en feront l’un des plus utiles agens de l’administration des affaires étrangères.

Loin de craindre que le 31 octobre recule dans cette voie de réparations et de redressemens légitimes, nous sommes persuadés que le président de la république, qui connaît l’étranger et qui sait mieux que personne l’importance qu’y ont les choix diplomatiques et consulaires, avancera dans cette voie d’un pas plus ferme et plus décisif que jamais. Au dedans et au dehors, les bons choix caractérisent l’administration. La véritable administration n’est pas dans le bulletin des lois et des ordonnances ; elle est toute entière dans les administrateurs ; elle vaut ce que valent ceux qui l’exercent.

Nous avons volontiers rendu justice au ministère tombé : arrivons maintenant aux causes et aux conséquences de l’acte du 31 octobre.

Quelles en sont les causes ? Nous écartons d’abord les petites causes, parce que nous n’y croyons pas, et nous prenons les causes de l’acte du 31 octobre telles qu’elles sont exposées dans le message du président.

Depuis un an, le parti modéré exerce le pouvoir, et c’est à lui que nous devons les retours de prospérité que nous voyons. Il a beaucoup fait déjà pour la sécurité du pays, et nous croyons qu’il peut beaucoup faire encore, s’il continue à rester uni : seulement les conditions de l’union sont changées. Les trois grands partis qui ont formé, en se réunissant, le parti modéré, avaient consenti à abdiquer chacun sa personnalité ; ils n’étaient plus le parti bonapartiste, le parti légitimiste, le parti orléaniste ; ils étaient un parti nouveau, fait pour des circonstances nouvelles. Chacun avait renoncé à l’espoir de faire triompher la partie de ses opinions qui le distinguait des autres, afin de mieux faire triompher la partie de ses opinions qui l’en rapprochait. La question sociale enfin primait la question politique. Cette alliance, où il entrait une part si considérable d’abnégation, pouvait-elle toujours durer ? Le dépouillement des préjugés et des espérances personnelles pouvait-il devenir persévérant ? Non, et le message du président accuse les anciens partis d’avoir relevé leurs drapeaux et réveillé leurs rivalités. Nous ne croyons pas, quant à nous, que cela se soit fait avec préméditation, mais nous croyons volontiers que cela s’est fait naturellement et par la force des choses ; ce qui nous le fait croire ainsi, ce sont surtout quelques-unes des réflexions les plus significatives du message.

De quoi en effet se plaint le message ? Il se plaint qu’on ne voie pas dans la direction des affaires la main, la volonté du 10 décembre. Tout un système a triomphé au 10 décembre, car le nom de Napoléon est à lui seul tout un programme. Traduisons en langage vulgaire la pensée du président. Cela veut dire que la volonté et la pensée du parti bonapartiste et du chef qui le personnifie disparaissaient dans la pensée commune du parti modéré, et que cette disparition devenait chaque jour plus pénible et plus désagréable au président et à son parti. Loin de nous plaindre de ce sentiment, nous le concevons ; il nous semble fort