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nécessité d’un gouvernement régulier. Les bienfaits du règne de Louis-Philippe grandiront, qu’on en soit sûr, dans la reconnaissance du pays, à mesure que tombera le tourbillon de sentimens haineux et de mensonges que les révolutions soulèvent. Tous ceux qui sont entrés dans la vie et qui ont servi la France pendant ces dix-huit années se souviendront toujours de ces princes, nos contemporains d’âge, nos compagnons d’études, nos frères d’armes, dont le nom n’est jamais arrivé à la France qu’à côté d’un service rendu et d’un devoir noblement rempli. La famille d’Orléans conserve donc parmi nous des liens d’idées, d’intérêts et d’affections indestructibles. Mais le parti orléaniste saura toujours subordonner ses préférences personnelles à des nécessités reconnues et à la volonté du pays. La famille d’Orléans lui donne elle-même l’exemple de cette abnégation. Elle se tient à la disposition de la France ; elle ne veut ni s’imposer à sa volonté, ni se séparer d’elle, dans aucune des vicissitudes, qu’elle traverse. Elle est exilée, elle n’est point émigrée. La position du parti orléaniste en France est semblable : ses intérêts et ses sentimens ne le détourneront jamais d’unir son concours sans arrière-pensée à tous les efforts qui seront tentés pour donner à la France un gouvernement régulier ; il ne sacrifiera jamais la certitude du bien possible au désir d’un mieux actuellement irréalisable. Prêt, lui aussi, aux élections, dans les fonctions publiques et dans l’armée, à remplir la tâche que les accidens imprévus pourraient lui imposer, bien loin de souhaiter ces accidens ou de les attendre dans une neutralité fataliste, il fera tout pour les prévenir. Il sait dès aujourd’hui qu’à moins que des accidens pareils ne changent les choses, il ne pourra pas, lui non plus, aux prochaines élections, porter en son nom et pour son compte, sur le point décisif, la majeure partie des forces de la société.

Ici se présente une question délicate et grave qui a préoccupé les esprits depuis la révolution de février et qui est toujours pendante. C’est l’hypothèse, non pas seulement de l’alliance, mais de la fusion possible du parti légitimiste et du parti orléaniste. Chacun de ces partis isolé est aujourd’hui incapable de prendre la prépondérance dans nos affaires. Il a semblé quelquefois, depuis la révolution de février, que les obstacles qui divisaient auparavant les légitimistes et les orléanistes avaient pu disparaître. Il a semblé que, si ces deux partis se fondaient en un seul parti monarchique, ils formeraient une immense majorité nationale, et pourraient écraser la révolution, rétablir la permanence du pouvoir et rendre la sécurité à la société. Si cette fusion est jamais possible, si un événement quelconque doit la déterminer un jour, ce n’est pas de notre part que viendront les résistances ; mais il ne s’agit pas de discuter en ce moment si elle s’accomplira dans l’avenir : il s’agit de savoir si elle est accomplie dans le présent. J’interroge la réalité :