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élémens de cette administration. On prétend, en effet, qu’il y a une divergence fâcheuse de principes entre le ministre des affaires étrangères et celui des finances, l’un partisan, l’autre adversaire de la liberté du commerce. On saura bientôt à quoi s’en tenir. C’est à la discussion du budget qu’on attend le nouveau ministère. Le cabinet Thorbecke n’a pas publié de programme, et il voudrait ne faire passer les lois de budget que comme de simples lois de crédit. Il rencontrera sur ce terrain une opposition assez forte ; pourtant on croit qu’il ralliera autour de lui la majorité de la chambre ; ses adversaires les plus ardens seront les conservateurs et les libéraux très avancés.


— La politique est toujours au calme de l’autre côté des Pyrénées. Tous les efforts qu’a faits l’opposition parlementaire pour passionner le débat ont jusqu’ici tourné contre elle-même. Il y a quinze jours, les interpellations de MM. Olozaga et Escosura qui avaient essayé de prendre l’offensive sur l’ensemble des questions intérieures et extérieures, dégénéraient en humilians aveux. Plus récemment, M. Sanchez Silva a essayé de semer des germes d’aigreur entre le gouvernement et les provinces basques, et le mécompte a été aussi complet. L’orateur progressiste ayant insinué que, si le ministère ajournait la présentation de la loi destinée à harmoniser les fueros avec l’unité constitutionnelle, c’était par peur, les députés basques se sont levés pour protester de la fidélité de leurs commettans, ce qui a coupé court à toute explication épineuse. Quant au fond même de la question, le cabinet a dû se retrancher, comme toujours, dans des réponses évasives, et nous défierions un ministère progressiste de faire mieux à sa place.

Il ne faut pas, en effet, se le dissimuler : la loi de 1839, en garantissant le maintien des fueros « sauf l’unité constitutionnelle, » a posé tout simplement un problème insoluble. Si les provinces basques sont ramenées à l’unité constitutionnelle, c’est-à-dire soumises aux charges générales de la conscription et de l’impôt, que deviennent les fueros ? Si, au contraire, les exceptions actuelles sont maintenues, que devient l’unité constitutionnelle ? Le gouvernement et les chambres sont, en un mot, placés dans cette singulière alternative, qu’ils ne pourraient appliquer la loi de 1839 qu’à la condition de violer l’un ou l’autre des deux principes posés par cette loi. Ce n’est pas pour un jeu de mots que des hommes sensés voudraient s’exposer à raviver les dangereuses susceptibilités des Basques. L’ordre dans la rue vaut bien, après tout, la symétrie dans les institutions, il n’y a qu’un moyen de faire entrer pacifiquement les populations basques dans l’unité constitutionnelle : c’est de les amener à désirer elles-mêmes cette unité. Que l’Espagne réforme les abus qui la rongent ; qu’elle rétablisse son crédit, épure son fisc, simplifie son administration, réhabilite ses tribunaux ; qu’elle joigne enfin aux nombreux élémens de prospérité que lui donne sa supériorité numérique et territoriale un peu de cet esprit d’ordre, d’activité et de moralité qui ont généralisé le bien-être dans les provinces privilégiées, et celles-ci seront les premières à réclamer les charges de l’unité pour en partager les bénéfices.

L’Espagne est, du reste, en bon train de réformes. Parmi les nombreux décrets que publie chaque jour la Gazette, nous en remarquons un qui sera,