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du procédé ; il n’a envisagé que la faute politique, il en a tiré une belle leçon sur les imperfections de notre charte républicaine, et le calme d’un esprit ainsi dégagé lui a communiqué une lucidité plus sereine et plus sagace dans l’analyse des matières d’état.

Puis on a voté ; — les légitimistes ne voulaient point, a-t-on dit, laisser porter à la tribune le manifeste de l’autre branche : ils ont fait une majorité pour clore la discussion ; ç’a été là peut-être le prétexte qui a couvert ou déterminé l’écart regrettable par lequel la révision n’a pas eu tous les suffrages qu’elle pouvait attendre. Nous n’en sommes pas moins profondément pénétrés du tort que se sont fait à elles-mêmes, qu’ont fait à la cause entière de l’ordre, dont elles devraient toujours être les soutiens, les quelques personnes influentes qui ont ce jour-là volé comme la montagne : un état-major et point de soldats ; M. Thiers tout seul accolé à M. Testelin. Quelles conséquences n’y a-t-il point à déduire d’une situation si nouvelle ! et quelles raisons assez intimes pourraient la justifier ?

Les légitimistes qui avaient voté la révision tout en murmurant contre M. Berryer, ceux qui n’avaient pas été jusqu’à la rupture ouverte, se sont dédommagés le surlendemain en renversant presque le ministère sur un coup de dé. C’était à propos du pétitionnement, et il y avait encore au jeu la main de M. Baze, dont nous ne voulons pas cependant toujours parler. Il a donné là un beau spécimen de cette activité malfaisante que nous décrivions l’autre fois ; on dirait qu’il tient absolument à gagner les voix de tous les partis extrêmes en servant leurs rancunes et leurs brouilleries : on n’est pas questeur pour rien. La majorité était encore plus étonnée que le ministère lui-même du beau chef-d’œuvre qu’on avait fait ; le ministère est resté sur les instances réunies du président de la république et des principaux membres de l’assemblée. Ce n’était pas un petit embarras de lui trouver des successeurs.

L’assemblée législative prendra le 10 août des vacances qui doivent durer jusqu’au 4 novembre ; elle a aujourd’hui réélu son bureau, elle va nommer sa commission de permanence, et l’on peut espérer que la majorité saura faire passer la liste conciliante formée d’un commun accord dans les réunions des Pyramides et de la rue de Rivoli.

On distribuera demain le remarquable rapport de M. Vitet sur le projet de loi relatif à l’emprunt des cinquante millions qui doivent servir à la ville de Paris pour la construction des halles et le prolongement de la rue de Rivoli. Il y a là de longs travaux à donner aux classes laborieuses et dans cette occupation assurée des ouvriers une garantie de sécurité générale. Le gouvernement et la ville de Paris n’auront peut-être jamais fait ensemble d’entreprise plus utile et plus grande ; il n’est que juste de reconnaître la part essentielle que le ministre de l’intérieur a prise dans cette vaste opération. On a déjà distribué le rapport de M. Passy sur le budget des dépenses de l’année 1852 ; c’est un document qui pourra sérieusement occuper les loisirs de la prorogation et qui prépare, avec l’habituelle netteté de M. Passy, l’une des plus graves discussions qu’on ait à prévoir pour la rentrée.

La France et l’Angleterre maintiennent toujours d’accord les protestations qu’elles opposent à l’incorporation des provinces slaves de l’Autriche dans l’Allemagne fédérale. L’Autriche, après avoir annoncé catégoriquement la ferme