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d’une pareille tâche réclame cette éternelle jeunesse du cœur, toujours ardente, toujours infatigable, et ce dévouement ignoré et furtif qui puise en lui-même sa récompense.

L’enseignement chrétien, tel est le put principal de la société de Saint-François-Xavier. Les réunions, qui ont lieu le dimanche soir, comprennent des exercices pieux et des instructions sur des sujets relatifs à la religion ou à la morale religieuse : ces conférences s’adressent aux ouvriers, mais un assez petit nombre en profite. Le personnel de la société, qui s’est en grande partie renouvelé dans le cours de quelques années, demeure aujourd’hui à peu près stationnaire. Nous est-il permis de sonder la cause de cette immobilité ? Ne serait-ce pas que, pour devenir et surtout pour rester sociétaire de Saint-François-Xavier, il faut être déjà fort avancé dans la voie chrétienne ? Si le sujet habituel des instructions roulait dans un cercle moins spécial, si les ouvriers, sans même faire partie de l’association, pouvaient être admis aux conférences, il y aurait là le germe d’une influence infiniment plus sérieuse sur l’éducation des masse.

Le bien que produit la société de Saint-François Régis est malheureusement le signe d’un désordre incontestable dans la vie de la population laborieuse. Quoique les chefs d’établissement, on doit le dire à leur honneur, se préoccupent de plus en plus de la dignité morale de l’ouvrier, le rapprochement des âges et des sexes devient trop souvent la source d’une précoce altération des mœurs. Oui, les ateliers sont bien tenus ; oui, la discipline est irréprochable ; mais, quand le seuil de la fabrique est franchi, qui peut prévenir les conséquences des relations qui s’y sont formées ? Il en résulte de fréquens concubinages et un grand nombre de naissances illégitimes. La société de Saint-François Régis a été fondée en vue de faciliter les mariages et par suite la légitimation des enfans naturels. Depuis une dizaine d’années, elle est intervenue dans plus de deux mille quatre cents mariages, et elle a procuré la légitimation à plus de 800 enfans. Son concours consiste à se charger elle-même d’une partie des formalités égales à remplir, à faire venir à ses frais, des localités éloignées, les actes de l’état civil ou les pièces nécessaires dans cette grave circonstance de la vie. La loi récente, qui accorde en pareil cas aux indigens la remise des droits de timbre et d’enregistrement, sera pour elle d’un utile secours. Bien placés pour juger du mérite de cette œuvre, les conseils municipaux de Lille et de Wazemmes l’ont inscrite au budget communal : une association qui agit aussi largement sur la constitution de la famille parmi les classes ouvrières n’appartient plus seulement au domaine de la charité chrétienne, elle devient une institution sociale ; mais la pensée religieuse répand sur elle un caractère de désintéressement et de bienveillance qui la rehausse et la féconde.

L’oeuvre des apprentis prend les fils des ouvriers au moment où ils