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acteurs illustres ou obscurs du drame si tristement dénoué, il ne subsiste plus rien entre nous des misères qui nous divisèrent en d’autres temps : conservateurs et opposans, broyés ensemble sous le char dont le roulement lointain n’avait pas frappé nos oreilles, enveloppés dans un désastre que les uns ont provoqué sans le vouloir, que les autres n’ont rien tenté pour prévenir, il ne reste qu’à nous unir pour faire profiter le pays de leçons si chèrement payées, et pour faire prévaloir le seul intérêt qui survive à tous les autres, celui de la vérité dans l’histoire. »

Ainsi se termine l’introduction aux Études sur l’histoire du gouvernement représentatif en France ; nous n’ajouterons rien à ces paroles. La préface de M. de Carné résume, on vient de le voir, un groupe de travaux variés qui soulèvent des questions trop graves pour que la Revue n’y revienne pas à propos du livre et de l’écrivain. v. de mars.


LA PRESSE ET LES ÉCRIVAINS ALLEMANDS SUR LA QUESTION d’ORIENT.

Si la crise que traverse en ce moment l’Europe n’a encore provoqué jusqu’à ce jour parmi la plupart des gouvernemens de l’Allemagne que de stériles et laborieuses délibérations, les populations germaniques ont du moins cherché en toute occasion à manifester énergiquement les tendances qui les animent. Nulle part les forces respectives des grandes puissances, leurs intérêts divers, la marche qu’on aurait à suivre pour arriver à l’établissement d’un nouvel équilibre européen, nulle part toutes ces questions d’un intérêt si puissant pour la civilisation moderne n’ont été agitées plus sérieusement depuis quelques mois qu’en Allemagne ; nulle part aussi, il faut le dire, elles n’ont été traitées dans un sens plus généralement favorable à la politique et aux légitimes exigences de l’Occident.

C’est un spectacle intéressant que celui de la presse allemande à l’heure actuelle. En temps ordinaire, la plus petite question la désunit ; les intérêts de localité ne manquent guère de l’emporter sur les intérêts généraux. À l’époque même la plus favorable peut-être au rétablissement de cette unité allemande tant poursuivie, le désaccord de la presse n’avait pas médiocrement contribué à faire avorter les efforts de ceux qui avaient cru un moment possible la réunion de l’Allemagne sous un seul sceptre. Aujourd’hui, au contraire, l’accord le plus parfait règne dans la presse germanique. La grande période de 1813 à 1815 exceptée, on n’a pas d’exemple d’une pareille unanimité. La Nouvelle Gazette de Prusse défend presque seule la politique de neutralité, et cet organe même, quoique très chaud partisan de la Russie, ne va cependant pas jusqu’à conseiller une alliance entre la Prusse et la puissance moscovite. Les journaux cités autrefois comme favorables au gouvernement du tsar, le Journal français de Francfort, la Gazette des Postes, l’Ami du Soldat, etc., ont presque entièrement abandonné le gouvernement de Saint-Pétersbourg, et la plus influente de toutes les feuilles allemandes, la Gazette d’Jugsbourg, appartient plus que jamais dans cette question à la politique autrichienne. Il est probable que si la Gazette d’Augsbourg ne paraissait pas sur le territoire bavarois, berceau de la coalition de Bamberg, et n’était pas souvent mal inspirée par des correspondans qui veulent lui faire croire à on ne sait quelle ambition cachée de la France et de l’Angleterre, elle se pro-