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et qu’il était en proie à de si cruels soucis, et il ajoutait que c’était surtout dans les occasions pénibles et difficiles qu’on devait montrer du dévouement, du courage et de la résignation.

On était ainsi arrivé à la fin d’avril 1813. Napoléon, accourant de France avec une armée de conscrits qu’il avait formée en quatre mois, et y joignant les forces déjà réunies sous les ordres du prince Eugène, commença cette campagne qui, pour un moment, devait lui rendre presque tout son prestige. À Lutzen, à Bautzen, à Würtchen, il battit les armées russe et prussienne réunies, et, bien qu’il n’eût pu avec des soldats novices, et presque sans cavalerie, tirer de ses victoires les résultats décisifs qu’il en tirait jadis, quelques semaines lui suffirent pour reconquérir la Thuringe et la Saxe, envahir la Silésie, reprendre Hambourg, se mettre en état de menacer Berlin. Suivant toute apparence, il serait encore sorti triomphant de cette lutte, si l’Autriche ne se fût hâtée d’intervenir d’abord à titre de médiatrice, puis, après la rupture du congrès de Prague, en déclarant la guerre à Napoléon, qui n’avait pas accepté les conditions de paix proposées par elle.

Aussitôt après la bataille de Lutzen, l’empereur avait chargé le prince Eugène d’aller prendre le commandement des forces de l’Italie et de l’Illyrie et de former sur l’Adige un corps d’observation. Décidé dès lors à repousser les offres du cabinet de Vienne, qui cependant lui laissaient encore une immense puissance, mais dont l’acceptation aurait humilié son orgueil, il avait compris qu’il fallait se mettre en défense contre ce nouvel ennemi. La présence du prince Eugène était donc nécessaire pour couvrir l’Italie. En se séparant de son père adoptif et bien que l’horizon fût déjà fort assombri, le vice-roi était loin de penser qu’ils ne dussent plus se revoir. Il croyait la paix prochaine, parce qu’il la désirait vivement, parce qu’il n’avait pas les passions qui la faisaient repousser par Napoléon. Comme bien d’autres, il essayait de se persuader que les victoires récentes de l’empereur, en désintéressant son amour-propre et en donnant à réfléchir aux ennemis, faciliteraient un accommodement. En passant par Munich, il vit le roi son beau-père, et il écrivit à l’empereur que les dispositions de ce prince étaient excellentes, qu’on pouvait compter sur lui. Le roi de Bavière était sans doute de bonne foi en l’autorisant à s’exprimer ainsi, mais les circonstances devaient bientôt l’entraîner dans un autre sens.

Les lettres que le vice-roi reçut de Napoléon dans le courant des mois de juin et de juillet et au commencement d’août détruisirent bientôt ses espérances de paix. Le cabinet de Vienne, à cette époque, conservait encore sa position de médiateur. Le 1er juin, Napoléon écrivait : «… La maison d’Autriche paraît fort exigeante. Il faut s’attendre à la guerre avec elle… Faites comme si vous deviez