Page:Revue des Deux Mondes - 1865 - tome 55.djvu/367

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

saura gré de reproduire ici quelques extraits de son avertissement où il raconte lui-même l’histoire de ces deux entreprises, qui répondent l’une à sa jeunesse, l’autre à son âge actuel, et que sépare (qui s’en douterait ?) un intervalle de quarante-six années. « Pour nous juger équitablement, dit-il, il faudrait se rappeler à quel point la philosophie ancienne était alors (en 1818) négligée en France. Seul, sans conseils ni secours, au milieu de l’indifférence du public, et malgré la désapprobation de la plupart de nos amis, qui nous voyaient à regret enseveli dans de si obscurs et si pénibles travaux, à travers toutes les contrariétés, la disgrâce, la persécution, la maladie, nous avons mené à fin cette laborieuse entreprise avec la constance que donne une ferme conviction, et les yeux attachés sur le but que nul autre que nous n’apercevait encore. Quelques années à peine écoulées, nos efforts, d’abord si froidement accueillis, ont porté leurs fruits et profité à la philosophie. M. de Gérando, dans la seconde et estimable édition de son Histoire comparée des Systèmes de Philosophie, a tiré des écrits par nous publiés de nombreux extraits qui ont éclairé la doctrine des alexandrins et de Proclus. Il appartenait au plus grand métaphysicien français de notre siècle de retrouver dans le vieil alexandrin les plus importantes vérités de la psychologie. M. de Biran avait commencé sur les traités de la Liberté, de la Providence et du Mal, des études qui attestent à la fois sa profonde sagacité et le point élevé où lui-même était parvenu. Depuis 1830, l’école d’Alexandrie et Proclus sont devenus parmi nous le sujet de travaux considérables… Comment s’étonner que nous éprouvions quelque faiblesse pour un ouvrage qui, malgré tous ses défauts, a le mérite d’avoir ouvert une carrière où d’autres depuis ont été plus loin que nous ? Quand donc nous l’avons vu épuisé et menacé de disparaître, nous n’avons pu nous résigner à laisser périr avec lui le souvenir de tant de veilles qui n’étaient pas restées infructueuses. De là l’idée de cette nouvelle édition de Proclus. »

Le nouveau et unique volume consacré aux œuvres inédites de Proclus est de beaucoup supérieur à tous égards aux six tomes de la première édition, dont il reproduit la matière, augmentée de la vie de Proclus par Marinus, de nombreux argumens, en latin, les uns empruntés à Fabricius, les autres écrits par M. Cousin lui-même, de notes, de citations empruntées à d’autres ouvrages de Proclus, enfin des hymnes de ce philosophe, déjà connus, il est vrai, mais dont le texte est ici reconstitué à nouveau d’après des manuscrits précédemment inexplorés. M. Cousin a donné à la partie philologique du livre les soins les plus attentifs[1]. On retrouve enfin au

  1. Un exemple suffira. Le texte grec des trois traités sur la Providence, la Liberté