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pression baisse de l’extérieur au centre, où elle peut diminuer jusqu’à 660 millimètres.

Une particularité digne d’attention est que la rive droite du courant cyclonique est très agitée, tandis que la rive gauche est à peu près inoffensive. Celle-ci est le bord maniable, celle-là la limite dangereuse. Cela s’explique, car dans la première la vitesse de rotation est diminuée de celle de translation, puisqu’elles sont opposées ; dans le bord dangereux au contraire, les deux vitesses sont de même sens et ajoutent leurs effets. On aura une idée nette des phénomènes cycloniques en lisant les récits suivans que j’ai un peu abrégés. Voici d’abord celui du capitaine Bridet, commandant de la corvette l’Églée, dans le canal de Mozambique.

« Le 1er avril 1858, le vent prit par rafales du sud-est au sud-sud-est, accompagné d’une pluie diluvienne. A six heures du matin, le baromètre marquait 758 millimètres ; vers midi, il continuait à baisser, et le vent à augmenter sans changer de direction ; nous vîmes bien que nous étions dans la ligne de progression du centre d’un ouragan des tropiques, et nous prîmes nos précautions en conséquence… Toute la journée, le vent augmenta et le baromètre baissa ; à six heures, il était à 748, à onze heures à 742 millimètres. Tout à coup un calme subit succède aux rafales, au moment où elles semblaient augmenter de violence. Nous passons sans transition des craintes les plus vives à la sécurité la plus complète ; le temps s’embellit, la pluie cesse.

« Autour de nous flottent les débris appartenant aux nombreux bateaux arabes qui sont déjà naufragés. A quelque distance, une masse noire va à la dérive ; c’est une goélette portugaise qui a chaviré. Le calme était si complet qu’on pouvait tenir sur le pont une bougie allumée. Le baromètre se maintenait à 740 millimètres. Nous passions par le centre de l’ouragan.

« A une heure en effet, les premières rafales du vent contraire nord-ouest tombaient à bord comme un coup de foudre… Nous sommes chassés à la côte, le navire monte sur la plage et se couche sur un lit de sable. Nous sommes sauvés… Le baromètre remonte peu à peu, les vents s’apaisent, et l’ouragan s’éloigne au sud. Le spectacle est navrant ; de tous les navires mouillés dans la baie trois seuls ont résisté, le reste a péri, etc. »

Écoutons maintenant le récit de M. le lieutenant de vaisseau Noël, commandant le Dupleix. L’ouragan vient du sud-est ; sa rotation est inverse du mouvement des aiguilles d’une montre.

« Le 14 septembre, à quelques lieues de Kinsin, une grosse houle du sud-est et une baisse lente, mais continue, du baromètre annonçaient l’approche du mauvais temps. Le 15, à deux heures du