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judiciaire qu’il a parcourue jusqu’à ce que toutes les juridictions aient été épuisées. Sous quelque forme que se soient produites les protestations contre la nullité du mariage de 1803, elles ont été condamnées par le conseil de famille, par le tribunal de la Seine, par la cour impériale. Je regrette vivement que la persistance de l’esprit de parti à entretenir le public d’une affaire si complètement et si irrévocablement terminée me force à citer encore les termes dont la justice s’est servie pour reconnaître la vérité et nous donner gain de cause. Je me bornerai au dernier considérant de l’arrêt de la cour impériale en date du 1er juillet 1861, considérant qui résume tout le procès :

« Considérant qu’ainsi l’acte de mariage qui sert de base aux conclusions des appelans a été annulé par deux décrets souverains, et son exécution repoussée par deux sentences rendues en dernier ressort ; que le résultat inattaquable de ces décisions est conforme d’ailleurs à la plus évidente équité ; que le mariage contracté par le prince Jérôme le 12 août 1807, sous les yeux de l’Europe entière, témoignage solennel des grandeurs de la France impériale, célébré en pleine bonne foi et sous les plus augustes sanctions, ne pourrait sans injustice voir les droits qu’il a fait naître sacrifiés à un acte passé en fraude des lois de la patrie, accepté par la double imprudence d’un mineur de dix-neuf ans et d’une famille avertie, et dont l’annulation souverainement prononcée est restée pendant plus d’un demi-siècle incontestée ;

« Par ces motifs :

« La cour, statuant sur l’appel, dit que l’action de la dame E. Paterson et de J.-N. Bonaparte est reconnue mal fondée, dans tous les cas non recevable, les déboute de toutes les fins et conclusions, dit que le dispositif du jugement dont est appel sera exécuté selon sa forme et teneur. »

Voilà donc la question du mariage civil complètement éclaircie et vidée. Reste la question du mariage religieux, que M. d’Haussonville traite dans son article.

L’empereur n’avait eu garde de les confondre. Par les décrets de mars 1805, il avait résolu l’une définitivement ; au mois de mai de la même année, il demanda au pape de résoudre l’autre, en déclarant religieusement nulle l’union contractée devant l’évêque Caroll. C’était uniquement par convenance religieuse et dans l’intérêt du catholicisme que l’empereur s’adressait au saint-siège, car, à tout prendre, il n’avait pas besoin de son intervention pour rendre à son frère la liberté matrimoniale, telle que la comportait la loi française. L’auteur de l’article se trompe dans cette circonstance en parlant ironiquement de ces sentimens de Napoléon. Sa sincérité ne pourrait sérieusement être mise en cause : il lui répugnait de donner, dans sa propre famille, l’exemple de l’indifférence religieuse, et d’être le premier, dans la personne de son frère, à se priver d’une sanction que la législation n’imposait pas aux citoyens, mais