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poste de ses confédérés ; elle a profité des embarras financiers que leur causait l’introduction dans leurs états du système militaire prussien pour obtenir d’eux de nouvelles concessions, pour les dépouiller encore de quelques-uns de leurs droits de souveraineté. La Saxe royale a éventé le piège, elle s’est empressée de se mettre en règle, de remplir toutes ses prestations constitutionnelles, moyennant quoi son armée forme un corps à part, organisé sans doute à la prussienne et inspecté chaque année par le roi de Prusse, mais dont le commandant en chef est seul nommé par celui-ci. Grâce à Dieu, le roi de Saxe possède encore le droit de nommer ses officiers ; il choisit aussi ses généraux, la ratification du suzerain réservée. Brunswick, Hesse-Darmstadt et Mecklembourg se mirent aussi en mesure ; on n’eut rien à leur réclamer au-delà de ce qu’exige la constitution[1].

Il en fut autrement pour les autres états ; ils se voyaient dans l’impossibilité de fournir leur quote-part. C’est sur quoi l’on avait compté. La Prusse s’empressa de les rassurer. De quoi s’inquiétaient-ils ? Elle ne voulait la mort de personne. Saxe-Weimar ne pouvait payer sa cote de 225 thalers par tête de soldat. On lui fit remise d’une partie de la somme, on l’autorisa à ne verser pendant sept ans dans la caisse fédérale que 162 thalers ; mais elle dut signer une convention par laquelle elle s’engageait à laisser aux Prussiens le soin d’organiser sa landwehr et de faire eux-mêmes le recrutement de ses soldats. Elle s’engageait aussi à considérer tous ses officiers comme appartenant à l’armée prussienne et à charger le roi Guillaume de les nommer, de les avancer, de régler les permutations et d’exercer le droit de grâce. Elle devait adopter encore pour ses troupes l’uniforme prussien ; on lui laissa toutefois le droit de déterminer la coupe et la couleur de ses cocardes. À cette convention, passée entre Berlin et Weimar, accédèrent par nécessité tous les états thuringiens, les trois autres petites Saxes, les deux principautés de Reuss et celle de Schwarzbourg-Rudolstadt. Avec d’autres gouvernemens, Oldenbourg, les deux Lippes, les villes anséatiques, on conclut d’autres conventions plus nettes et plus concises : on incorpora tout simplement leurs troupes dans l’armée prussienne. Hambourg n’a plus de soldats ; mais deux bataillons prussiens tiennent garnison dans ses murs. Hormis les états qui ont pu faire face à leurs obligations, d’un bout à l’autre du territoire fédéral le roi de Prusse est chez lui, et c’est à savoir si ses confédérés sont encore chez eux. Qu’est-ce qu’un souverain qui a perdu

  1. Plus tard, le grand-duc de Mecklembourg a conclu à son tour avec la Prusse une convention militaire, par laquelle il renonce à quelques-uns des droits que lui laissait la constitution.