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« Vers la fin de la septième semaine, dit-il, après avoir essuyé d’innombrables soufflets (buffetings) de Satan, et plusieurs mois d’inexprimables épreuves de jour et de nuit sous l’esprit de servitude, il plut à Dieu enfin d’écarter le pesant fardeau, de me rendre capable de m’attacher à son fils bien-aimé par une foi vivante, et en me donnant l’esprit d’adoption, de me marquer de son sceau, selon mon humble espérance, jusqu’au jour même de la rédemption éternelle ; mais, oh ! de quelle ineffable joie, de quelle joie riche de gloire, fut remplie mon âme, lorsque le fardeau du péché fut enlevé et qu’un sentiment permanent de l’amour du Dieu qui pardonne, et une pleine assurance de foi éclata dans mon âme désolée ! D’abord mes transports étaient comme une haute marée qui déborde ses rivages. Partout où j’allais, je ne pouvais m’empêcher de chanter des psaumes presque à haute voix. Ensuite, ces ravissemens furent plus calmes, et Dieu soit béni, sauf très peu d’intervalles accidentels, ils se sont toujours depuis conservés et accrus dans mon âme. »


Whitefield était, sous bien des rapports, inférieur à Wesley ; mais plus entraînant dans la prédication et plus absolu dans la doctrine, il se laissa emporter aux extrémités du calvinisme en matière de prédestination, sorte d’excès dont Wesley sut toujours se défendre. La témérité de Whitefield le rendait peut-être plus propre à tenter l’inconnu. Ordonné prêtre en 1736 et très attaché à l’église qu’il n’abandonna jamais, il prononça à Bristol son premier sermon, et il prêcha d’une manière si neuve et si véhémente qu’il émut toute rassemblée et fut accusé d’avoir rendu fous quinze de ses auditeurs, seulement pour les avoir fait passer de l’indifférence à l’inquiétude. Il produisit des effets analogues à Londres, à Glocester, et il faisait remonter le premier réveil dont il eût été témoin au sermon qu’en 1737 il avait prononcé dans cette ville sur la nécessité d’un nouveau baptême en Christ. Bien accueilli des dissidens et du peuple, il fut bientôt attaqué par des membres du clergé qui l’appelèrent un filou spirituel (a spiritual pick-pocket), parce qu’il vidait leurs églises.

Son zèle le conduisit en Géorgie auprès de Wesley, où tous deux à l’envi essayèrent leur mission. A son retour en Angleterre, il trouva les églises fermées pour lui, et comme les lois limitaient la prédication dans les maisons particulières, il imagina de prêcher en plein champ, ce qu’aucune loi n’avait prévu. Il avait pour lui l’exemple des apôtres, et dans l’église catholique les ordres mendians l’avaient renouvelé.

À cette époque (fin de 1738), les trois amis, John Wesley, son frère et George Whitefield étaient donc réunis. « Cette réunion, a dit