Page:Revue des Deux Mondes - 1870 - tome 86.djvu/157

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

recevoir à bras ouverts. Il ne faut pas que les théoriciens de l’absolutisme théocratique enlèvent à la liberté de la pensée chrétienne ce glorieux passé, et refassent en quelque sorte à la contrainte religieuse une généalogie suspecte ; le droit d’aînesse appartient incontestablement à la liberté, et le résultat de la mission d’Origène montre que ce n’est pas à tort qu’on met en elle sa confiance, car il ramena Bérylle par une discussion loyale. Il ne fut pas moins heureux dans une seconde conférence avec d’autres hérétiques, pour laquelle il fut délégué par un synode des mêmes églises. « Il discuta avec tant de force, dit Eusèbe, qu’il amena les dissidens à répudier leur erreur. » N’oublions pas que les évêques qui siégeaient à ces synodes étaient élus par le peuple de leur église, et qu’ils ne ressemblaient en rien à un sénat recruté au gré d’un pouvoir monarchique.

Avec le IVe siècle commencent les conciles généraux, qui ont la prétention de représenter la chrétienté. Cette grande transformation est l’une des premières conséquences de l’union de la religion nouvelle avec l’empire. Constantin fut très scandalisé des querelles qui divisaient l’église. Il voulait bien la favoriser et l’enrichir, mais à la condition qu’elle ne fût pas la plus incommode des administrations de l’empire, et qu’elle présentât ce bel ordre et cette discipline bien réglée qui furent toujours l’idéal de l’esprit romain. Le concile de Nicée fut convoqué pour en finir avec les orageux débats que l’arianisme avait soulevés. Il fut tenu aux frais de l’empereur, dans son palais, et pour la première fois l’Orient et l’Occident chrétiens se trouvèrent en présence. On sait quelle fut l’issue de ce premier des conciles généraux ; l’arianisme en sortit condamné, mais non vaincu, car il succombait à un coup de majorité auquel le puissant « évêque du dehors, » comme on appelait l’empereur, n’avait que trop poussé. Aussi la formule qui a triomphé au premier concile œcuménique est-elle un moule trop étroit pour la métaphysique chrétienne, qui a droit à plus de liberté, comme le prouve l’histoire de l’âge précédent. Ce n’est pas non plus sans tristesse que l’on voit les représentans de l’église, dont plusieurs portaient encore les stigmates de la persécution, attentifs et presque édifiés par les discours de cet étrange néophyte qui s’appelle Constantin. S’il a la foi correcte, il n’a pas les œuvres, car à peine aura-t-il prononcé le discours, je dirai presque le sermon d’adieu du concile, qu’il rivalisera avec les plus cruels césars en envoyant à la mort sa femme et son fils. Le concile de Nicée fut essentiellement impérial, ou du moins entièrement en dehors de l’influence de l’évêque de Rome.

Le second concile œcuménique se réunit à Byzance en 381, il prend la résolution la plus grave en complétant le symbole de Nicée par l’adjonction du dogme du Saint-Esprit. L’église de Rome n’y