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différentes parties de l’organisme, qu’on n’aurait sans doute jamais soupçonnées à l’aide de tout autre mode de recherche, ont été mises en évidence. Les investigations sur les phases successives du développement des animaux, en montrant pour tous une origine identique, en révélant les détails les plus curieux sur les changemens qui se produisent dans les organes et dans, les conditions d’existence d’une foule d’espèces, en apportant les comparaisons les plus instructives entre les états permanens et les états transitoires d’une infinité d’êtres, ont ouvert de nouveaux horizons à la philosophie.

Ainsi nous sommes arrivés à une époque où la science, riche de vérités solidement établies, a pris un caractère de grandeur des plus remarquables. A l’aide des moyens si variés dont les investigateurs ont usé, on est assuré de faire encore de belles et nombreuses découvertes, de compléter bien des connaissances restées imparfaites, de parvenir à de nouvelles généralisations ; mais une vue différente de celles qui, jusqu’à présent, ont servi de guide aux naturalistes, commence à se manifester, promettant de porter au plus haut degré nos ressources dans l’investigation des phénomènes de la vie. Lorsque, seule, l’étude comparative des instrumens ne suffira plus pour éclairer sur le but de certaines modifications, pour expliquer la raison de divers changemens dans les formes, dans les dispositions, dans le développement excessif ou dans l’atrophie de quelques parties, lorsque à son tour la recherche expérimentale, nécessairement condamnée à se mouvoir dans des limites assez restreintes, deviendra impuissante, les ressources de l’esprit scientifique ne seront pas épuisées. Il restera encore à suivre ce que l’on pourrait appeler l’expérience de la nature. En un mot, c’est de l’observation constante des coïncidences entre tous les détails de l’organisation et les circonstances de la vie de chaque animal qu’il faut attendre la solution des plus grands problèmes de l’histoire naturelle. Rien dans l’organisme, semble-t-il, n’existe sans un rôle à remplir. À cette règle, on entrevoit une seule exception ; des parties dépendantes des tégumens fort développées chez des mâles et absentes chez leurs femelles ne sont probablement autre chose que des ornemens.

La conformité de séjour et d’aptitude n’est plus aujourd’hui pour aucun zoologiste le signe assuré de ressemblances fondamentales, et cependant, par suite de cette tendance que nous avons signalée, elle conduit encore parfois à de graves erreurs d’appréciation. Une des choses les plus admirables de la nature, c’est l’extrême diversité obtenue d’un fonds commun, diversité qui, chez les êtres, se manifeste à la fois dans leurs caractères et dans les circonstances de leur vie. Une variabilité de conditions d’existence souvent grande chez les espèces d’un même groupe naturel, une sorte de répétition