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non-exécution laisse en souffrance des intérêts qu’il importe de satisfaire. »

Ce dont M. Haussman a le plus abusé est, sans contredit, l’excédant prétendu des recettes. Il en a fait le fondement de tous ses calculs ; il n’a pas craint, même dans son dernier rapport, qui est comme son testament administratif, d’écrire que l’excédant des revenus ordinaires pourrait servir soit à continuer les grands percemens, soit à diminuer les droits d’octroi. M. Chevreau reconnaît la vanité de cette dernière promesse, il déclare qu’il est impossible de diminuer les charges des contribuables, qu’il faut proroger la surtaxe et le second décime de l’octroi, maintenir les centimes spéciaux de l’instruction primaire et les taxes de pavage. Certes nous applaudissons à cette courageuse déclaration, de même que nous relevons avec plaisir dans le cours du mémoire la nomenclature « de certaines dépenses portées jusqu’ici au budget extraordinaire, et qui par leur périodicité et leur caractère obligatoire devront figurer dans le budget ordinaire. » C’est revenir aux vrais principes. Pourquoi faut-il qu’à propos de l’excédant le nouveau préfet de la Seine retombe dans les erremens de son prédécesseur, bien plus, qu’il les dépasse ? M. Haussmann ne composait l’excédant du budget ordinaire qu’après l’avoir chargé des intérêts de la dette ; il ne laissait en dehors, et nous l’en blâmions, que l’amortissement. M. Chevreau augmente l’excédant du revenu ordinaire de tout le chiffre des annuités de la dette, intérêts et amortissement. C’est ainsi que pour 1870, là où M. Haussmann avait trouvé 37 millions seulement d’excédant, il en inscrit 80, et il arrive à constituer pour sept années, de 1870 à 1876, ce gros total de 602 millions. Il y a ici un abus de langage et une source d’illusions dangereuses. En vain dans les dépenses correspondantes on aura fait figurer 554 millions pour les intérêts et l’amortissement de la dette actuelle et 79 millions pour le service du futur emprunt de 1870 ; ce n’est pas là une dépense extraordinaire, pas plus que l’excédant de M. Chevreau n’est un excédant régulier. En admettant les 2 millions annuels d’accroissement de recettes ordinaires que le préfet de la Seine prévoit dans l’avenir comme on a fait dans le passé, on doit avouer qu’il n’y aura aucun excédant de recettes une fois le nouvel emprunt émis, — si l’amortissement figure avec les intérêts des dettes dans le budget ordinaire, — et c’est avec le solde du nouvel emprunt seulement qu’on pourra continuer les grands travaux. Que fera-t-on avec ce simple boni de 80 millions en sept ans ? Il y a quatre grandes entreprises commencées, l’avenue Napoléon, la rue de Rennes, le boulevard Saint-Germain, la rue Réaumur. Sans doute il importe de ne pas laisser inachevées des églises, des mairies, des écoles, l’aqueduc de la Vanne surtout, et M. Chevreau a bien fait de dresser ce bilan des 128 millions applicables au paiement des dettes morales ;