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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




31 mars 1870.

Tout ce qui simplifie les choses et dégage les situations, tout ce qui dissipe une équivoque ou met fin à une incertitude est d’une bonne et prévoyante politique. C’est à ce titre que la lettre adressée le 21 mars par l’empereur à M. le garde des sceaux a été un acte d’heureuse et intelligente décision accompli à propos. Elle tombait au milieu de toute sorte de controverses vagues sur le pouvoir constituant, sur le rôle du sénat dans les institutions nouvelles, sur les attributions définitives du corps législatif. Toutes ces questions restaient par le fait indécises, même après le sénatus-consulte du 8 septembre 1869, même après l’avénement du ministère du 2 janvier. Elles passaient comme des ombres provoquantes dans les discussions du corps législatif ; au sénat, on les pressentait et on les craignait à la fois ; elles pesaient, en un mot, sur l’esprit public, qui, dans son impatience de logique, avait hâte d’arriver à cette étape nouvelle marquée d’avance. La lettre impériale avait le mérite de répondre à cette attente et d’éclairer tout le monde, en chargeant M. le garde des sceaux de préparer un sénatus-consulte et en précisant avec une suffisante clarté le sens de ce complément de révolution pacifique.

Imprimer un caractère définitif aux réformes politiques déjà réalisées, restreindre les dis, positions véritablement constitutionnelles au strict nécessaire, en plaçant désormais ces dispositions fondamentales sous la sanction du plébiscite, ou, pour parler autrement, en rendant à la nation elle-même le pouvoir constituant, — rejeter tout le reste dans le domaine des lois ordinaires, faire du sénat une chambre haute partageant avec l’autre assemblée toutes les attributions législatives, — tel était l’objet multiple de l’œuvre que l’empereur retraçait à grands traits dans sa lettre du 21 mars. Jusque-là cependant ce n’était qu’un programme livré aux méditations des ministres. Que s est-il passé depuis ce moment ? Il est vraisemblable que les questions indiquées par la lettre