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le cratère, quand la fumée et les émanations sulfureuses le permettent, ne vont guère plus bas que 40 ou 50 mètres, et se trouvent bientôt arrêtés avant d’atteindre le fond de l’entonnoir.

En 1631, le Vésuve était resté tranquille pendant près d’un siècle et demi depuis l’an 1500. Non-seulement les cendres et les scories s’étaient refroidies, mais la nature avait repris quelques-uns de ses droits, si l’on en croit l’abbé Braccini, qui fit alors cette exploration[1]. Il paraît qu’il visita le sommet du cratère, qui semblait complétement éteint, et qui avait 5 000 pas de circonférence sur les flancs. Des broussailles assez épaisses et des halliers avaient poussé çà et là, et servaient de refuge à des sangliers que venaient relancer les chasseurs des environs. Au milieu de la plaine, dans l’intérieur, paissait du bétail. Là s’offrait un passage tortueux par lequel on pouvait descendre au milieu des rochers et des pierres pendant un mille environ ; on arrivait alors à une autre plaine plus spacieuse, couverte de cendres, où trois petits étangs étaient disposés en triangle : celui de l’est contenait de l’eau chaude, corrosive et amère, un autre, à l’ouest, de l’eau plus salée que celle de la mer, le troisième de l’eau chaude sans goût particulier.

Il est difficile d’ajouter une foi absolue aux descriptions de l’abbé Braccini. N’était-ce pas lui qui prétendait, quelques mois plus tard, avoir mesuré au quart de cercle la hauteur des pierres enflammées que la montagne lançait pendant l’éruption, et qui donnait je ne sais quel chiffre fantastique qui fait sourire ? Sa relation du moins nous fait sentir combien l’aspect et l’état du Vésuve étaient différens de ce qu’ils sont aujourd’hui. Si le Vésuve, après cent trente et un ans de repos, avait déjà cette fécondité, que devait-ce être dans l’antiquité, après tant de siècles pendant lesquels il avait paru absolument éteint !

Il est vrai qu’une question se présente. Pendant cette période de sommeil, que devenait le feu terrestre qui n’avait point d’issue ? Que devenaient les vapeurs et les gaz qui se développaient dans le foyer souterrain ? Les lois générales qui président même à ce qu’on peut appeler des phénomènes d’exception n’avaient-elles pas leur application ? Il faut remarquer d’abord qu’à cette époque l’Etna avait plus de puissance et plus d’activité qu’aujourd’hui. Or l’Etna et le Vésuve paraissent en corrélation, réunis par des conduits souterrains dont Stromboli est l’indice et pour ainsi dire la soupape de sûreté ; mais, sans aller si loin du golfe de Naples, à l’extrémité, sur le territoire où Cumes avait été fondée par les Grecs, se manifestaient des phénomènes volcaniques beaucoup plus graves que ceux qui subsistent de nos jours, je veux parler de ces champs phlé-

  1. Campi Phlegrœi, page 62.