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LE DRAME DU VÉSUVE.

l’Italie, des cylindres semblables, en ivoire ou en os, ont été souvent ramassés par les explorateurs, qui se contentaient de dire : « morceaux de flûte. » Quelle n’a donc pas été la satisfaction de M. Fiorelli lorsqu’en faisant briser la carapace de cendres qui recouvrait le plâtre versé dans une cavité, il vit paraître l’empreinte d’un grand coffre, et, ajustées sur le plâtre aussi exactement qu’elles l’avaient été sur l’original, la serrure en fer et les charnières en os, qui avaient mieux résisté que le bois ! Oui, les morceaux de flûte étaient des charnières que les trous servaient à fixer ; si les tombeaux antiques en contiennent fréquemment, c’est que les objets précieux enterrés avec le mort étaient serrés dans des coffrets qui se sont réduits en poudre, tandis que les cylindres des charnières tombaient sur le sol et restaient sans explication.

La plus belle application du moulage au mobilier pompéien est celle qui a permis de restituer un triclinium antique. Les lits sur lesquels les convives étaient couchés ont été montés, refaits, exposés au musée de Naples. Les ornemens de bronze, les incrustations, la couleur même qui était restée adhérente à la cendre pendant que le bois s’en allait en poussière, ont fourni les élémens de la restauration la plus charmante. La forme simple et logique, le renflement du dossier pour recevoir le matelas, ce dossier n’existant que sur les deux faces du triple lit, la décoration concentrée également sur les parties apparentes parce qu’elle était inutile du côté du mur, l’ingénieuse disposition des reliefs en bronze, l’opposition de la couleur rouge dont le bois était revêtu et des bandes d’argent, unies tour à tour et ornées, qui couvraient les angles de la menuiserie et en faisaient ressortir les moulures, tout a un caractère de nouveauté qui fait désirer que les révélations sur le mobilier des anciens soient poussées plus loin.

Malheureusement Pompéi n’est pas le lieu le plus favorable aux études de ce genre. D’abord la ville a été dépouillée par ses habitans, qui ont évidemment retiré la plus grande partie de leurs meubles. Ensuite les pierres ponces qui couvrent et entourent tous les objets posés sur le sol sont rebelles au moulage, ou donnent des empreintes très imparfaites. Ce n’est que par exception, lorsque la cendre fine a pénétré dans une chambre bien close, ou lorsque les gens sont allés mourir au-dessus de la couche de pierres ponces, que l’on peut mouler objets et cadavres. Les deux cinquièmes de la cité antique sont aujourd’hui déblayés : l’agora grecque, le forum impérial, les théâtres, l’amphithéâtre, la basilique, les curies, les temples, les bains, les plus beaux quartiers, les demeures les plus riches, c’est-à-dire que ce qu’il y a d’important semble avoir été découvert. Désormais tout paraît connu d’avance, les maisons se