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LE DRAME DU VÉSUVE.

d’un de ces couloirs creusés assez régulièrement l’empreinte d’un masque humain. On admire cette solidité inaltérable d’une matière qui a moulé si bien les objets qu’elle enveloppait. Toutefois, si l’on essaie avec un couteau d’entailler, non pas l’empreinte elle-même, mais les parties qui l’avoisinent, on reconnaît avec étonnement que rien n’est plus facile, et que ce n’est encore que de la cendre durcie.

Une rue d’Herculanum, à l’extrémité de la ville, du côté de la mer, a été fouillée méthodiquement ; quelques maisons ont été nettoyées, la maison dite du Squelette, la maison d’Argus, une auberge, des magasins, une prison d’esclaves, etc. ; tout est à ciel ouvert, et l’on s’y promène comme dans une rue de Pompéi. L’espace ainsi déblayé est de 3 à 4 000 mètres carrés, surface assez considérable pour des observations du genre de celles qui nous occupent en ce moment. Or l’on n’y trouvera aucun débris de lave, aucun indice de lave, aucun dégât produit par la lave. Au contraire, si l’on examine les terrains à pic qui entourent cet espace de quatre côtés, tout est cendre, il y a 10 et 12 mètres de cendres ; ce n’est qu’à la partie supérieure qu’on aperçoit des charbons, des projectiles volcaniques, des couches diverses correspondant aux éruptions modernes et séparées par des couches de terre végétale qui avaient eu le temps de se reformer entre chaque éruption. Cherchez les monceaux de déblais extraits de ces fouilles, étudiez-les ; vous n’y verrez encore que de la cendre, rompue par la pioche aussi facilement que de l’argile ou de la pouzzolane.

Comment la cendre, dira-t-on, qui doit être légère, pulvérulente, sans cohésion, aurait-elle acquis assez de dureté pour prendre des empreintes durables, former des voûtes résistantes et avoir des apparences de solidité si trompeuses qu’on l’ait prise pour de la lave ? L’exemple de Pompéi et des empreintes recueillies dans les caves de la maison de Diomède est déjà une réponse ; mais des analogies plus frappantes encore aident à comprendre cette force d’adhérence. J’ai déjà raconté la formation des bancs de pépérin dans les vallées du Monte-Cavo par l’accumulation des cendres du volcan amalgamées avec les eaux. Cet amalgame est devenu tellement dur qu’il a fourni aux Romains des matériaux de construction. Les catacombes de Rome, qui ne sont autre chose qu’un tuf volcanique, c’est-à-dire des sables et des débris réduits en poudre, tassés par leur propre masse et par le temps, sont également friables, faciles à tailler, plus faciles à dégrader, et cependant on y a creusé des couloirs, des voûtes, des plafonds, des escaliers, des tombeaux innombrables et jusqu’à cinq étages de souterrains les uns au-dessous des autres. Il ne faut pas non plus oublier que la pouzzolane, qui