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restriction l’entier exercice du gouvernement et de tout pouvoir nécessaire pour assurer l’exécution des lois et les faire respecter. » L’absolutisme le plus arbitraire pourrait sortir de là. En cas de décès du roi, la régence devait appartenir de droit à la reine, et, à défaut de celle-ci, le régent du royaume serait nommé par l’empereur des Français parmi les princes de la famille royale ou parmi les nationaux. On voit que Napoléon avait pris toutes ses mesures.

Le traité conclu entre la France et la Hollande était frappé au même coin. « Considérant, disait-il ; que l’état des esprits en Europe fait du renouvellement périodique du chef de l’état en Hollande une source continuelle d’agitations, que le peuple hollandais a absolument besoin d’un gouvernement héréditaire pour rester tranquillement en possession de son indépendance politique et de sa liberté religieuse et civile, qu’il n’a pas moins besoin d’une protection puissante, et que la France est essentiellement intéressée à son alliance et à la stabilité de ses institutions, sa majesté l’empereur des Français, roi d’Italie, tant pour lui que pour ses successeurs à perpétuité, garantit à la Hollande le maintien de ses droits constitutionnels, son indépendance, l’intégrité de ses possessions dans les deux mondes. Sur la demande formelle faite par leurs hautes puissances représentant la république batave que le prince Louis-Napoléon soit nommé et couronné roi héréditaire et constitutionnel de Hollande, sa majesté défère à ce vœu ; néanmoins il est statué que les couronnes de France et de Hollande ne pourront être jamais réunies sur la même tête. » Un article stipulait la conclusion immédiate d’un traité de commerce entre les deux pays. Autant die promesses, autant d’engagemens violés. D’après l’article 6, le roi de Hollande sera à perpétuité grand dignitaire de l’empire sous le titre de connétable, et d’après l’article 7 les membres de la maison régnante de Hollande resteront personnellement soumis aux dispositions du statut qui fait loi pour la famille impériale de France. Ces deux derniers articles n’auraient jamais dû être consentis par le prince Louis, pour peu qu’il eût devisé les intentions réelles de son frère. En revanche, l’article 3 devait, dès la première heure, lui être particulièrement agréable : il lui attribuait la jouissance de deux palais à La Haye, du domaine et château de Soestdyk, un revenu annuel de 500,000 florins en biens-fonds et une liste civile de 1,500,000 florins, en tout plus de 4 millions de francs[1]. C’était énorme eu égard au pays, à l’époque et à la situation très obérée des finances hollandaises. Aujourd’hui, dans une situation des plus prospères, le roi des Pays-Bas, dont la fortune privée est insignifiante, doit se contenter de

  1. Le florin de Hollande vaut environ 2 francs 12 centimes.