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charge de la France. L’amiral Sercey, pendant une croisière dans les mers asiatiques, avait reçu de la régence de Java des avances s’élevant à 4 millions de florins, pour lesquelles il avait donné des remises sur le trésor français. Cette dette, remontant à sept ou huit années, avait été reconnue en 1800 par Talleyrand, et Schimmelpenninck en avait en vain réclamé le paiement. Louis se flattait d’être plus heureux, lorsqu’à sa grande surprise son frère lui répondit sans plus de façon que ses prétentions étaient surannées, et qu’il n’avait pas d’argent disponible. Pourtant il obtint un allégement notable du fardeau provenant de l’entretien des troupes françaises. Il lui fut accordé que deux régimens français seulement et deux états-majors généraux resteraient à la charge de la Hollande ; mais ce ne fut pas sans peine, il dut même user d’une menace qui pouvait encore, au lendemain de son arrivée au trône, produire quelque effet : il menaça d’abdiquer. En même temps, on fit revenir peu à peu de Boulogne, sous prétexte de la réparer, la fameuse flottille, qui restait inutile dans la vase depuis l’expédition manquée contre l’Angleterre ; une fois de retour, les équipages furent congédiés. Il y eut surtout une résolution du roi qui lui concilia les sympathies générales. Les ports de Hollande étaient, comme ceux de France, bloqués par les croiseurs anglais, et des règlemens sévères interdisaient tout commerce avec l’Angleterre. C’était pour les Hollandais un état de choses bien plus insupportable que pour les Français. Aussi avait-on cherché des biais. Sous prétexte de se procurer les nouvelles et les journaux nécessaires, les agens consulaires français et plusieurs officiers accordaient des licences aux navires dont les armateurs ou cosignataires leur payaient un droit exorbitant. Le roi prit des mesures pour mettre un terme à ce scandale ; mais on sut bientôt aussi que, sans ouvrir officiellement les ports aux navires anglais ou venant d’Angleterre, il était décidé à regarder avec indulgence tous les arrivages qui ne seraient pas trop directement contraires aux règlemens provoqués par l’état de guerre. C’était aller au-devant des plus ardens désirs de la population. Le roi déclarait encore que sa ferme intention, quand la paix serait rendue à l’Europe, était d’établir un régime de très grande liberté commerciale ; il caressait même volontiers l’idée de faire un jour de la Hollande une sorte de grand port franc, librement ouvert aux marchandises de toute origine et devenant ainsi le premier marché du monde. Sur ce point, le roi entrait parfaitement dans l’esprit d’un peuple avant tout marchand et navigateur.

La modération dont il faisait preuve dans les affaires de justice n’était pas moins appréciée. Il se proposait d’établir dans les faits ce qui n’était encore que sur le papier, l’unité des lois civiles. Les