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bien gouvernée, tiendrait à honneur d’avoir ses comptes constamment à jour. Voilà le commentaire que pendant ses deux présidences Thomas Jefferson a su ajouter à la déclaration des droits du peuple américain, en marquant ce commentaire d’une empreinte qui jusqu’à ces derniers événemens ne s’était jamais effacée.

Dans ce cadre et sous cette règle, la confédération n’eut plus qu’à suivre le cours de ses destinées, et c’est ici que l’exemple devient concluant. Quand le pacte fut signé, elle comptait 3 millions d’habitans, dont 600,000 esclaves, répartis dans treize états d’étendue fort inégale le long des côtes de l’Océan-Atlantique. Ces habitans ne cherchèrent pas d’autres instrumens de fortune que ceux qui étaient le plus immédiatement à Leur portée, le commerce, la navigation, l’agriculture, qui firent d’eux les facteurs par excellence et pour certains articles les pourvoyeurs habituels du monde entier. Ils n’y mirent pas de raffinemens, se prêtèrent aux échanges avec abandon, sans réserve, et trouvèrent en définitive que leur lot valait bien celui des autres nations. Leurs ports se garnirent de vaisseaux, leur littoral se couvrit de villes, leur sol de cultures ; le peuplement, chaque jour accru, gagna sur les solitudes. Déjà en 1790 ils étaient 4 millions, 5 millions en 1800, au-delà de 6 millions en 1810 et de 13 millions en 1830, enfin près de 30 millions en 1860, à la veille de la guerre civile. Le nombre des états avait proportionnellement augmenté, les signes de la richesse publique s’étaient multipliés avec la même évidence. En 1858, le mouvement des flottes marchandes comprenait à l’entrée 20,772 navires jaugeant 6,605,052 tonneaux, à la sortie 21,274 navires jaugeant 6,802,013 tonneaux, en tout 42,051 navires jaugeant 13,407,887 tonneaux ; sur ce matériel de navigation, la part du pavillon national atteignait les deux tiers des existences. A ne remonter qu’à 1846, où l’on avait compté, entrée et sortie comprises, 28,700 navires environ jaugeant 6,700,000 tonneaux, c’était en douze ans un progrès de 100 pour 100 dans le tonnage et de 50 pour 100 dans le nombre des navires.

Même phénomène pour le mouvement des échanges. Les premiers tableaux dressés par Pitkins entre 1821 et 1830 établissent en moyenne la valeur des importations générales aux États-Unis à 426 millions, celle des exportations à 408 millions ; total 834 millions. De cette date au moment de la guerre civile il suffit de détacher trois millésimes significatifs : 1840 avec 546 millions à l’entrée et 670 millions à la sortie, total 1,216 millions, — 1855 avec 1,366 millions à l’entrée et 1,168 millions à la sortie, total 2,544 millions, — enfin 1857 avec 1,871 millions à l’entrée et 1,615 millions à la sortie, total 3,486 millions. Quant à la part de l’agriculture dans cet ensemble de transports et d’échanges, on en jugera par un seul