Page:Revue des Deux Mondes - 1870 - tome 88.djvu/239

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

notre globe ait longtemps possédé une chaleur propre, capable de contre-balancer l’influence des latitudes : il en a été certainement ainsi à l’origine ; mais il est aisé de reconnaître que ce phénomène initial n’a rien de commun avec la persistance singulière d’une température tropicale sur tout le globe, et qu’enfin l’abaissement tardif et graduel de cette même température a dû dépendre de toute autre cause.

L’épaisseur énorme des terrains solidifiés les premiers, la faible conductibilité calorique des roches dont ils sont composés, enfin l’énormité du temps écoulé, sont autant d’argumens décisifs contre cette manière de voir. Du reste, si le refroidissement du globe était la vraie cause de la décroissance de la température, cette décroissance aurait nécessairement suivi une marche graduelle, et elle entraînerait pour les époques très anciennes, comme celle des houilles, une chaleur hors de toute proportion par son intensité avec ce que nous connaissons des êtres vivans de cette époque, incompatible même avec toute espèce d’organisme. La chaleur centrale, à quelque point de vue que l’on se place, ni la moindre élévation des montagnes, pas plus que la distribution géographique des terres, ne fourniront l’explication demandée. Cette explication dépend sans doute d’une cause plus générale qui plane au-dessus de toutes les autres, sans exclure pourtant les secondaires et les partielles.

Le savant M. Heer a émis l’idée que le système solaire tout entier, tournant autour de l’astre invisible qui lui sert de centre, avait pu, dans le cours de cette année incommensurable dont l’homme ne verra jamais la fin, traverser des parties inégalement échauffées de l’espace stellaire. De cette marche seraient sorties des périodes de froid et de chaleur qui se succéderaient comme des saisons, mais à des époques indéterminées. C’est là sans doute une théorie séduisante au premier abord, mais il faut songer que rien, dans les phénomènes observés jusqu’ici, ne ressemble à des intermittences marquées de chaleur et de froid. La chaleur originaire se prolonge plus ou moins longtemps, puis elle décline sans que l’on ait droit de soupçonner l’existence d’abaissemens antérieurs, tandis que l’on constate aisément une succession continue d’espèces affiliées exigeant une chaleur supérieure à celle que nos zones tempérées ou froides sont maintenant en mesure de leur départir. La parfaite coïncidence des latitudes, disposées autour du pôle miocène dans le même ordre relatif qu’aujourd’hui, empêche de supposer, comme le voudrait M. Evans ; que ce pôle se soit successivement déplacé. Nous avons déjà insisté sur ce point ; mais il existe une autre hypothèse que nous ne saurions passer sous silence, parce qu’elle a été adoptée par plusieurs hommes de talent, bien qu’elle ne nous semble pas plus vraisemblable que les précédentes. Nous voulons parler de la périodicité