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une association qui, pendant la guerre de sécession, a contribué au soulagement des blessés et des malades de l’armée du nord, moins encore par des souscriptions en argent ou en nature, quoique les unes et les autres aient été fort abondantes, que par la coopération personnelle d’une partie de ses membres, hommes et femmes, jeunes et vieux, religieux et laïques. On estime que le total des valeurs appliquées par la Commission sanitaire et ses auxiliaires au soulagement des soldats malades ou blessés n’a pas été au-dessous de 120 millions de francs ; mais il n’y a pas de somme d’argent qui puisse représenter les efforts ingénieux, les inventions, la vigilance déployés par elle, et surtout l’action directe des personnes qu’elle avait groupées. Elle avait ses voitures d’ambulance, les meilleures qu’on eût jamais faites, ses wagons de chemins de fer et ses bateaux à vapeur, bien arrangés les uns et les autres pour leur destination spéciale, le transport des blessés ; elle fournissait des médecins et des infirmiers quand le personnel administratif était insuffisant, et des femmes zélées et pieuses s’y ajoutaient en nombre. Près de chacun des hôpitaux au gouvernement, elle avait un dépôt rempli de vêtemens chauds, de linge, de couvertures, d’oreillers, avec des masses de conserves, soit de viande, soit de bouillon, de cidre, de vin, d’eau-de-vie, et où les bons livres, qui sont la médecine de l’âme, n’étaient pas oubliés. Elle avait surtout des trésors inépuisables de bienveillance, de paroles fortifiantes et douces, de bons procédés apportés au chevet de chacun. Le docteur Evans fait remarquer combien cette sollicitude répandit de consolations sur les blessés et les malades. « À peine sortis des rangs du peuple avec lequel ils étaient en communication constante, les délégués, dit-il, étaient plus près de lui, sentaient plus profondément les besoins du soldat volontaire que ne le faisaient les bureaucrates enveloppés dans la triple cuirasse de la routine officielle. » Sans la Commission sanitaire, le nombre des morts eût été notamment plus considérable.

La forte constitution de la Commission sanitaire des États-Unis et l’étendue des services qu’elle a rendus sont de ces signes auxquels se reconnaît un peuple vraiment libre, en possession de la liberté réelle et pratique autant que de la liberté théorique inscrite sur les monumens et dans les livres officiels. La Commission sanitaire a pu s’organiser et agir puissamment aux États-Unis parce que, au moment où éclata la guerre, l’Amérique ne connaissait pas la centralisation exagérée et le système réglementaire qui paralysent l’initiative soit individuelle, soit collective des citoyens. Beaucoup de personnes éclairées et charitables parmi lesquelles les femmes sont aussi nombreuses que les hommes, cherchent à constituer parmi nous une ou plusieurs associations qui se proposeraient la mission si bien remplie par la Commission sanitaire américaine. Nous